Afghanistan : "Les talibans ont déjà gagné"
Afghanistan : "Les talibans ont déjà gagné"

Guerre en Afghanistan : « Les talibans ont déjà gagné »

Si l’ancien président américain George W. Bush a critiqué le retrait d’Afghanistan des troupes de l’Otan, en le qualifiant d’ »erreur » c’est parce que les talibans gagnent du terrain. La chute de Kaboul ne fait plus de doutes pour beaucoup d’Afghans.

Londres envisage sérieusement ce scénario et se dit prêt à collaborer avec le mouvement islamiste, s’il arrivait au pouvoir. Les puissances occidentales vont-elles pouvoir s’aligner avec un tel discours ? Entretien avec Emmanuel Dupuy, président de l’IPSE, think tank spécialisé sur les questions de défense et de sécurité.

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Les talibans ont fait des avancées significatives, notamment avec une stratégie qui consiste à récupérer les axes de sortie du pays. Ils en contrôlent désormais trois : vers le Turkménistan, vers l’Iran et vers le Tadjikistan. Il faut particulièrement noter qu’ils contrôlent la principale route de sortie vers l’Iran, dans la mesure où c’est une zone où il y a un fort activisme anti-talibans avec une mobilisation des milices chiites contre les talibans. Il y aura sûrement une forte résistance locale contre la présence du mouvement islamiste dit Emmanuel Dupuy

Il faut noter que 40% des districts tombés sous le contrôle des talibans, l’ont été sur les deux dernières années et les 60% restants durant les 6 derniers mois. On observe donc une réelle accélération de l’avancée des talibans, avec une stratégie très symbolique, qui consiste à occuper un terrain, momentanément, avant de se replier, pour envoyer un message fort : ils peuvent rentrer dans les villes et contrôler les postes-frontières.

Sur les 34 plus grandes villes afghanes, quasiment aucune n’est sous le contrôle des talibans, parce qu’ils n’ont pas besoin d’y entrer, mais ils le feront, symboliquement, quand la victoire politique leur sera acquise. Pour le moment, ils se contentent de montrer leur capacité à pouvoir rompre la mainmise territoriale du gouvernement afghan.

Au-delà de cette victoire qui se profile sur le plan militaire et politique, il faut ajouter le départ des forces occidentales, mais aussi une victoire psychologique, puisque Kaboul est prise de panique. Toutes les ambassades sont en train de fermer et de nombreux pays demandent à leurs ressortissants de quitter le territoire. La France va d’ailleurs envoyer un avion le 17 juillet, afin d’évacuer les siens.
Certains donnent 6 mois, d’autres quelques jours seulement, à Kaboul, avant que les talibans ne lancent définitivement leurs opérations pour s’en emparer.

Emmanuel Dupuy : Il y a eu, de la part des États-Unis, dès 2014, sous Barack Obama, une volonté de discuter avec des talibans et de tenter d’engager un dialogue et des négociations. Les Américains discutent donc avec les talibans sans associer personne, mais on ne sait pas lesquels et on ne sait pas de quoi ils discutent, si ce n’est les exigences qu’ils ont : la libération des prisonniers, de chaque côté, le respect du cessez-le-feu, de la Constitution et surtout, la promesse de rupture des liens avec les groupes terroristes internationaux.

Les talibans discutent d’ailleurs avec les américains, mais aussi avec Téhéran, avec Moscou, avec Tachkent, avec le Pakistan et d’autres. Mais ils ne discutent pas avec le reste des forces occidentales, qui se retrouvent engagées dans un agenda américains, sans avoir leur mot à dire.

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