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Me Amadou Diallo, président Amnesty international : « 51 morts dans les lieux de détention ou lors des manifestations »

Le nombre de personnes décédées sous le magistère de Macky Sall irrite bien le président d’Amnesty international, Me Amadou Diallo. Ce dernier n’a pas mis de gants pour tancer le régime et les forces de l’ordre. Il était l’invité de l’émission du « Grand oral » sur Rewmi Fm. 

Considérez-vous injuste la mort de personne en détention comme Idrissa Goudiaby ?

Vous savez, au-delà de ce sentiment d’injustice, de plus en plus dans ce pays, on constate que des personnes qui devaient être en situation de protection se voient retirer la vie dans des conditions difficiles. Le nombre de morts de personnes en contact avec les forces de l’ordre est important.  Nous sommes dans le rejet total de cette situation.  Car depuis 2017, je suis venu avec une liste établie par Amnesty. J’ai dénombré pour des cas connus 51 personnes décédées ou dans les lieux de détention ou lors de manifestations.  Et si on essaie de faire ce bilan le ratio est de 4 morts par an. C’est inacceptable car toute mort est un trouble à l’ordre public et le juge a l’obligation de rechercher les responsables et de les sanctionner. Mais le constat malheureux c’est que ces morts ne sont jamais élucidées et les personnes désignées pour vérifier cela donnent l’impression de ne pas les rechercher ces auteurs.

 

Il y a une avalanche de législations.  Comment faire la part belle entre la défense des citoyens et l’impératif sécuritaire face aux menaces? 

 

C’est cette question qui revient et qui est brandie par les personnes qui justifient l’injustifiable. Les dispositions de la convention ne justifient pas la torture et cela ne doit pas créer la corrélation entre la sécurité et les tortures. C’est moralement inacceptable. C’est déplorable car l’émoi créé avec le décès de François Mancabou prouve que des gens ne doivent pas trouver la mort dans les lieux de détention. On oublie vite au Sénégal et ces personnes ne doivent pas être oubliées.  Les gens doivent s’en rappeler.  Quand je parle de Dominique Lopy, Alioune Badara Diop,  Modou Bakhoum, Ndeye Adja Camara, Aboubacar Dia, Abdoulaye Wade. Yinghou, Cheikh Maleyni Sané, Babacar  Ndong,  Bassirou Faye, Cheikh Ly, Fallou Sène Etc. Tout le monde est choqué par la sortie du procureur qui est l’avocat de la société. Le procureur doit rassurer et apaiser et faire revenir la sérénité, mais il a pris parti et donc n’est plus avocat de la société. Il a cherché à établir la responsabilité pénale de François Mancabou en violation de la présomption d’innocence. Le procureur a dit qu’il avait des éléments dans le fameux complot. C’est dommage car on doit respecter la mort. Il devait éviter de remuer le couteau dans la plaie. L’instruction est secrète. Quand il dit qu’il a une vidéo de 13 mn, c’est incroyable. Mancabou devrait être dans une chambre sécurisée et être aussi en sécurité. S’il est en garde à vue, il doit y avoir forcément un agent  qui le surveille. C’est une maladresse légendaire. Pendant 13 mn, un agent de police aussi, laisse une personne se cogner la tête, c’est faux. Il a été terriblement torturé car ils l’ont forcé à avouer une chose dont il n’est pas le fauteur. Il préparait un voyage en Guinée. On a saisi beaucoup de choses. Le procureur semble ne pas lire le dossier et cela laisse paraître le doute dans ses déclarations.

 

On ne comprend pas ces formes d’interrogatoire. Pourquoi utiliser la torture pour avoir des aveux? 

 

Oui elles sont utilisées, et c’est malheureux. Même la présence d’un avocat ne peut pas empêcher cela ; car l’avocat s’entretient avec le mis en cause pendant 30 mn. Mais ce qui se passe, il ne peut pas le savoir. Quand le mis en cause informe l’avocat, celui-ci dépose un dossier et cela peut ne pas parvenir au Procureur. Si l’agent est de mauvaise foi, le dossier sera biaisé. La famille peut désigner un médecin comme c’est le cas avec Mancabou. Il n’était pas en garde à vue.  Il était dans une situation de non droit, mais curieusement il était aussi escorté.  Je l’ai vu et il était dans un piteux état en réanimation à travers la baie vitrée. Il répondait en hochant la tête, comme quoi il a été torturé. On a violé ses droits et on lui a ôté la vie. François a été victime du système judiciaire et nous devons tous agir pour que justice lui soit rendue car il faut une autopsie indépendante.

 

Où en est le dossier Idrissa Goudiaby? 

 

Il doit être transporté ce lundi à Dakar pour autopsie, un mois après son décès. Il y a eu des lenteurs injustifiées et le Procureur de Ziguinchor a aussi accepté la contre-expertise comme le dit la loi.  La procédure a été retardée et on espère que le résultat ne sera pas affecté par cela et on espère aussi que le Procureur ne va pas fausser les résultats avec ces démarches-là.

 

Mais il y a aussi des cas d’évasion avec Pape Mamadou Seck. Cela ne vous paraît pas suspect ?

 

Vous savez moi j’ai l’impression que les autorités ne font pas preuve de sérieux et c’est grave. J’ai entendu le Directeur de l’administration pénitentiaire, mais dans sa déposition, il cherche à disculper l’administration. Mais que l’on nous dise comment cette personne gravement malade s’est échappée ! La rumeur fait état de sa mort probable. Légitiment, est-ce que l’Etat n’est pas en train de légitimer sa mort? Mais quelles que soient les explications, l’administration pénitentiaire a commis une faute. Je ne peux dire s’il est mort ou en vie.

 

Me que vous inspirent ces éléments dits de la « force spéciale » 

 

Cela m’inspire quelqu’un qui agit dans l’espace politique. S’agirait-il d’un montage pour atteindre un homme politique ?

 

On a ces affaires-là qui se multiplient, qu’est-ce qu’il faudrait faire avec ces libertés menacées ?

 

C’est un cycle infernal qui fait peur, le niveau de violation des droits est énorme et il faut un respect de la vie humaine. Il y a le caractère sacré de la vie humaine dans la Constitution. On continue à tuer malgré les conventions et les lois. Depuis que Macky est là, le Sénégal a énormément reculé. Il devait faire progresser le pays mais il ne l’a pas fait. Depuis 2012, toutes les libertés sont violées au quotidien. Des morts dans les manifestations et toutes les affaires sont en stand-by et sans enquêtes. Les forces de défense bénéficient de liberté provisoire et sont promues. Tout le monde doit se mobiliser et dans le cas Mancabou, nous avons décidé de porter plainte contre le commissaire de la Sûreté urbaine. Nous l’avions fait avec Harouna Sy. Il faut que les gens arrêtent de servir le régime. Amnesty ne va jamais laisser tomber le combat. Le pays évolue aussi.

 

Avec cette campagne, le discours politique va vers l’ethnicisme, la religion etc. Y-a-t-il un risque pour le pays ?  

 

Ce risque de division est possible, même s’il est fort peu probable. Ce pays, avec les pères fondateurs, a réussi à bâtir une nation, car le brassage est aussi un socle. Il ne peut pas y avoir de conflit basé sur cette question, mais il y a la responsabilité des hommes politiques et des hommes de médias qui s’amusent à cela. Il faut faire preuve de maturité. Que des politiques et des hommes de médias usent ce concept pour se faire aimer, cela est un problème ; le discours régionaliste est puni par la loi. On laisse faire surtout et des personnes qui n’appartiennent pas au pouvoir font cela. L’Etat du Sénégal a aussi le devoir de réagir.  Quand l’Etat encourage cette chose, cela devient grave.

 

 Avez-vous des craintes face au 3ème mandat ?

 

Tout le monde sait que cela va plonger ce pays dans le chaos.  Mais avec Wade, il y a eu 14 morts. Macky qui a été élu sur cette base et qui dit qu’il ne fera pas un autre mandat, veut aujourd’hui briguer un 3e mandat, cela risque de basculer dans la violence.  Il organise un référendum pour tout changer et il revient pour changer cela, c’est dommage. Il faut que les hommes politiques et les dirigeants arrêtent de mentir au peuple. C’est insultant, il faut arrêter de cacher la vérité aux citoyens. Pourquoi dire des choses pendant longtemps et vouloir tout changer un jour, c’est loin de l’éthique et du respect de la parole donnée. Si on n’arrête pas, des personnes devront parler au Président pour sauver le pays.

MOMAR CISSE


 

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