L’euro poursuivait son recul face au dollar mercredi, atteignant un nouveau plus bas depuis deux décennies en raison des inquiétudes qui pèsent sur l’économie du Vieux continent.
Vers 11H15 GMT (13H15 à Paris), l’euro cédait 0,77% à 1,0188 dollar, après avoir reculé jusqu’à 1,0187 dollar, un plus bas depuis décembre 2002. L’euro recule depuis mardi « sous l’effet cumulé de craintes de récession en Europe et de turbulences financières alimentées par une nouvelle flambée des prix de l’énergie dans la région (notamment les prix du gaz et de l’électricité) », explique Guillaume Dejean, analyste chez Western Union.
La fin forcée d’une grève en Norvège pour relancer coûte que coûte la production dans trois gisements de pétrole et de gaz n’a pas suffi à rassurer les investisseurs, qui restent focalisés sur la situation en Ukraine et en Russie. « Si la Russie ne relance pas ses exportations, il est probable que l’UE soit en manque de gaz à la fin de l’hiver », prévient Holger Schmieding, analyste chez Berenberg, et la situation pourrait empirer avec une diminution de l’offre russe. « Le pic des prix du gaz et l’incertitude sur le marché de l’énergie sont les principales raisons pour lesquelles nous nous attendons à une récession en zone euro à partir de l’automne 2022 et jusqu’à mi-2023, et pas une simple stagflation », estime-t-il.
Le spectre d’une croissance stagnante et d’une inflation forte (stagflation) était pourtant le scénario du pire il y a encore quelques mois, et reste l’inquiétude principale aux Etats-Unis.
-« Impossible d’acheter » l’euro-
La Réserve fédérale américaine pourrait relancer l’économie en assouplissant sa politique monétaire alors que les Européens peineraient à compenser leur manque de gaz, estime Ulrich Leuchtmann, analyste chez Commerzbank. « Il est logique que le dollar américain soit le grand vainqueur de cette situation », conclut-il.
Par ailleurs, « la crédibilité de la Banque centrale européenne (BCE) a été érodée » par sa « réaction excessive » à une augmentation de l’écart dans les taux d’emprunts de pays membres de la zone euro, estime Kit Juckes, analyste chez Société Générale, qui juge donc l’euro « impossible à acheter » cet été. La devise « est tellement peu attractive que même une crise politique majeure ne permet pas à l’euro de remonter face à la livre ! », souligne-t-il.
La livre prenait en effet 0,44% à 85,57 pence pour un euro, alors que les incertitudes s’amoncèlent sur le futur du Premier ministre britannique Boris Johnson après les démissions spectaculaires de deux de ses ministres. « Les déboires de Westminster ajoutent une couche d’incertitude aux perspectives peu réjouissantes de l’économie britannique et mondiale », commente Susannah Streeter, analyste chez Hargreaves Lansdown.
Selon elle, la réaction mesurée de la livre britannique (-0,34% à 1,1906 dollar, frôlant le plus bas depuis 2020 atteint la veille à 1,1899 dollar) est due au fait qu' »un gouvernement sans Boris Johnson à sa tête n’est pas vu comme un gros danger pour l’économie britannique ».