Par décret n°2023-339 en date du 16 février 2023, la prochaine élection présidentielle est fixée au dimanche 25 février 2024. L’imminence de ce grand rendez-vous de la démocratie impose de réfléchir sur le contexte politique sénégalais dominé par une violence physique et morale exercée sur des citoyens aux ambitions présidentielles clairement affichées.
Cette longue dérive du régime de Macky Sall s’est intensifiée ces dernières semaines plongeant de plus en plus notre pays dans la terreur. Face à l’angoisse de fin de règne, le pouvoir perd la raison. Sinon comment justifier les confiscations et restrictions des libertés individuelles et collectives des citoyens ? Comment comprendre cette spirale d’agressions, ces inquisitions, pressions, interdictions et emprisonnements dont font l’objet les membres de l’opposition ? Comment expliquer que l’épreuve judiciaire signifie pour les adversaires de Macky Sall souffrance, brutalité, malheur et élimination ? Autant d’injustices qui risquent d’embraser notre pays à un an du scrutin.
Pour autant, doit-on oublier l’enjeu de cette élection ?
Dans 12 mois, le peuple souverain est appelé à élire le président de la République du Sénégal ; à confier, pour cinq ans, les destinées de notre nation à un homme ; à lui donner un pouvoir éminent surpassant tous les autres. Pour décider, les électrices et électeurs doivent avoir l’embarras du choix entre des candidats aux convictions, idéologies et programmes différents. Car au final il appartient au peuple souverain, à travers les urnes, d’accorder sa confiance à qui il veut. Et cette souveraineté ne saurait être l’expression d’une volonté particulière, fût-elle celle du président de la République.
Paradoxalement, l’espace politique loin de vibrer au rythme du débat programmatique est, en ce moment, intoxiqué par la confrontation, la théâtralisation de la violence, l’escalade verbale (exacerbée par le champ lexical du chaos et de la mort). Une véritable tragi-comédie qui si l’on n’y prend pas garde risque de plonger le Sénégal dans une démence collective.
Que l’on ne s’y trompe pas, l’élection présidentielle est la rencontre d’un homme avec son peuple et cette communion ne passe pas par la rue. Bien au contraire, elle s’effectue sur des bases objectives, rationnelles et responsables. Mais hélas, le désir excessif de pouvoir est devenu le foyer de tous les reniements, de toutes les inhibitions et de toutes les tensions. Pire, la voix de certains espérés être des sentinelles, est édulcorée par des immixtions inopportunes, des silences suspects et des postures parfois gênantes. La prise de parole publique des hommes avertis cesse, petit à petit, d’être des soupapes de sûreté pour notre vivre ensemble. Il en résulte, malheureusement, l’apparition de brèches laissées entrouvertes par la déliquescence morale. Il est donc impératif de revenir au pouvoir de la discussion en replaçant le débat politique au centre de cette pré-campagne électorale. Aller, librement, vers les populations dans les villages, les communes, les départements et les régions ; discuter avec elles des problèmes particuliers de chaque territoire ; leurs proposer un projet de société adossé à une idéologie claire et à des convictions fortes, voilà ce qui sortira notre pays de l’hubris politique en l’éloignant de la violence de rue qui n’honore ceux qui l’exercent.
La république n’a pas besoin de lobbyiste encore moins de despote, il n’y a pas de vérité chez l’un et pas d’épaisseur chez l’autre. La République a besoin d’un homme qui écoute, discute et partage avec ses concitoyens sur les questions de paix, de développement, de justice, de bonne gouvernance, de santé, d’éducation, de culture, de sport… La République cherche un homme qui garantira la cohésion et la stabilité sociale. Car il est évident que celui qui réunit par ce qui est commun est plus grand et plus puissant que celui qui exacerbe le choc des différences.
L’urgence c’est de libérer la politique de cette déferlante de passions désordonnées. Le refus du débat et la vacuité du discours avec la rumination des mêmes idées cacherait sans doute une carence idéologique qui doit interpeller chaque électeur et le placer en face de ses responsabilités.
Dans cet océan de défiance, de surenchère et d’incertitudes, la pirogue « Sunugaal » tangue dangereusement. Ces flancs, éprouvés, cognent la vague de la violence et ses pagaies emportés par les bourrasques politiciens. Au bord du chavirement, il urge de confier la barre à un citoyen qui saura tenir le bon cap. Un homme d’État qui mesure la responsabilité d’agir au milieu de cette tempête de passions aveugles. Un homme d’action, pas de spectacle. Un homme sérieux, tempéré et rassembleur qui saura faire la promotion de la raison et des valeurs humaines. Un homme dont le parcours politique et la posture républicaine sauront taire les rafales destructrices et réconcilier la Nation avec elle-même.
Ne l’oublions jamais, le Sénégal a un récit merveilleux de démocratie et de paix qu’il convient de consigner dans la mémoire collective en promouvant l’équité qui doit en demeurer la caution.
Le Sénégal doit être le meilleur des états, celui où les hommes vivent dans la concorde. Une vie de raison, de vertu de l’âme. La vraie vie.