Le Sénégal dépense 1070 milliards de FCfa pour importer des produits alimentaires. Sur ce montant, on importe 1,4 million de tonnes de riz, 860 000 tonnes de blé, 450 000 tonnes de maïs, plus de 200 000 tonnes de sucre, plus de 210 000 tonnes d’huile, plus de 347 000 tonnes de fruits et légumes. Notre pays débourse également 100 millions d’euros (65,5 milliards de FCfa) pour importer du lait. C’est l’équivalent de 300 millions de litres de lait et 55 000 vaches laitières avec 20 000 hectares d’ensilage.
Le Sénégal, c’est 18 millions d’habitants, 14 régions, 46 départements, 557 communes, dont 525 de communes rurales. Pour ces communes rurales, 80 % nourrissent les Sénégalais. Si un ministre de l’Agriculture veut réussir, il doit impérativement aider les communes rurales. Malheureusement, aujourd’hui, l’agriculture familiale travaille trois mois, voire maximum quatre, dans l’année. Il va falloir, à mon avis, faire une transition entre l’agriculture familiale et l’agro-industrie. Les deux vont de pair. Maintenant comment il faut faire ? Vous venez dans une commune et vous prenez 200 ha. Vous faites quatre pivots de 30 ha ainsi que des forages. Vous réalisez un bassin de rétention et on le pompe avec du solaire pour avoir de l’eau. Là, vous pourrez cultiver 12 mois sur 12. Lors de la saison des pluies, on laisse aux paysans le choix de cultiver à leur manière.
À la période sèche, les bassins sont là. Après la saison des pluies, si toutes les infrastructures sont mises en place, on peut cultiver de l’oignon, de la carotte, de la pomme de terre, etc. Si on le fait, le pays prend son envol. Les gens diront que l’État n’a pas les moyens de créer des coopératives dans 557 communes, mais il faut d’abord commencer à en créer. À côté de ces coopératives agricoles communales, où on tire l’agriculture et l’élevage familial, on peut créer des fermes. Nos parents rassemblaient les excréments des moutons, des chevaux, des chèvres…qu’ils laisser composter. C’est le meilleur engrais ! Pendant l’hivernage, ils l’utilisaient dans les champs.
Actuellement, il y a une manière industrielle de le faire. Alors, comment une grande ville comme Dakar, avec plus de 100 tonnes de déchets par jour, dont 50 % de déchets organiques, n’arrive-t-elle pas à compter une seule unité de compostage industrielle au Sénégal ? En dehors de cet aspect, on aura des fermes agro-écologiques. On va mettre ensemble arboriculture, maraichage, culture des grandes céréales, élevage, pisciculture… J’ai cette vision de l’agriculture qui consiste à tirer le paysan vers le haut.
Pour la mécanisation, ces 10 dernières années, l’État a dépensé plus de 200 milliards de FCfa. Allez dans le monde rural, l’objectif de 10 % n’est pas atteint. Ceux qui doivent recevoir le matériel ne le voient souvent pas. Vous avez vu ce que j’ai fait avec l’engrais cette année ? C’est une première dans l’histoire du Sénégal. À côté de cet accompagnement en faveur de l’agriculture familiale, il y a maintenant les agro-industriels qui sont les accélérateurs. Mais, ce qui peut faire démarrer l’économie, créer de l’emploi, nourrir les populations, c’est l’agriculture familiale. Il faut l’encadrer, former ceux qui s’y activent et les financer. C’est la phase la plus difficile, c’est-à-dire refaire le Sénégalais. Il nous faut retrouver le culte du travail.
Le Sénégal importe 347 000 tonnes de fruits et légumes pour un montant de 65 milliards de FCfa. Ces 10 dernières années, ce sont 500 milliards de FCfa que notre pays a dépensés pour l’importation de fruits et légumes. C’est là que se trouve l’absurdité. Avec 30 milliards de FCfa d’investissement, on n’importe plus de pomme de terre, ni de carotte, ni d’oignon. Où sont les milliardaires, les épargnants ? Chaque Sénégalais a 1000 FCfa non ? Quand on avait besoin de 1000 milliards pour la Covid-19, on les a mobilisés. Et là, nous n’avons même pas besoin de 45 milliards. Maintenant, en quoi consistent ces hangars ? Il s’agit de mettre en place un partenariat public-privé. Et je propose à l’État d’aller voir ses partenaires à propos des dons de la Chine, de la Fondation Bill Gates, du Mastercard Foundation ou de son budget. On a juste besoin de 5 %.
Ensuite, je dirai aux banques de me financer. Et nous absorberons les premières pertes issues des 5 %. Pour les investisseurs privés, je demanderai 15 %. Et ce pourcentage, associé au crédit/export, va donner la possibilité d’accéder aux crédits/export à 85 %. En outre, j’appliquerai la diplomatie économique. J’irai en Chine pour demander qu’on me construise le hangar. Ensuite, en Hollande qui a les meilleurs appareils de ventilation. Puis, je proposerai un projet de loi pour exiger que tous les produits agricoles passent d’abord dans les hangars parce qu’on ne peut pas permettre qu’ils aillent directement aux consommateurs sans, au préalable, un contrôle de qualité, des mesures de calibrage, des normes d’hygiène.
En Europe, quand vous entrez dans les supermarchés, les légumes sont prêts à la consommation. Or, ici, quand vous allez dans les marchés, la manière dont les légumes sont nettoyés, ça ne donne pas envie de voir. Maintenant, la production nationale passera dans les hangars de stockage. Comme ça, tout sera normé. Ainsi, sur toute la chaîne de valeur, on crée de l’emploi. Il y aura un droit de passage qui sera payé pour rembourser les prêts.
Au bout de 10 ans, le remboursement sera fait. À propos de la mécanisation, l’État a dépensé, ces 10 dernières années, plus de 200 milliards de FCfa. Cela a servi à quoi ? Il faudra créer des Gie de mécanisation et laisser les multinationales apporter leurs tracteurs. On demandera ensuite aux agriculteurs de payer 25 % et l’État de se charger des 75 %. Ainsi, le problème sera réglé. Tant que le service agricole n’est pas rendu, je ne payerai pas. Y a-t-il une possibilité de perdre de l’argent ? La finalité, n’est-ce pas c’est de produire ? Un tracteur dure 25 ans s’il est bien entretenu. En Europe, les agriculteurs gardent leurs tracteurs pendant longtemps. Il y a eu des programmes sous le régime passé et que l’État a intégralement mis en œuvre en les payant en trois phases. Et la deuxième phase n’est même pas encore achevée. Le programme Intermaq, c’est 89 milliards de FCfa au temps de l’ancien régime.
Avec ce montant, on pouvait en sortir 30 milliards de FCfa pour faire une usine. Sismar pouvait faire le travail avec 10 milliards de FCfa. J’ai trouvé ces paradoxes sur place et j’essaie de rectifier. Comme ça, on va valoriser l’industrie nationale. Ce sont ces genres de paradoxes que nous avons trouvés dès notre installation.