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Investiture du nouveau président de la République du Sénégal- Après le sacre, place à l’Action immédiate ! (Par Mamadou NDIAYE)

Comme prévu, l’investiture du nouveau président de la République du Sénégal, monsieur Bassirou Diomaye Faye, a eu lieu au CICAD devant un parterre de chefs d’Etats, de chefs de gouvernements, de présidents d’institutions d’ici et d’ailleurs, de hauts membres du régime sortant et de personnalités appartenant à la coalition du vainqueur. La cérémonie s’est tenue dans une relative sobriété, qui préfigure le poids des chantiers qui attendent le nouvel attelage gouvernemental.

Diomaye en mode apparence travaillée

Du point de vue des apparences, le nouveau président semble avoir beaucoup appris de sa dernière apparition publique. Cette fois, son costume était bien taillé sur mesure et son allocution n’était pas truffée de ratés. Et c’est vraiment tant mieux, car le peuple sénégalais avait à cœur de voir un chef qui dégage une allure imposante et toute régalienne, devant autant d’illustres personnalités venues de toutes parts.

Oublier tous les atouts, se préparer à lutter contre les handicaps

L’euphorie de l’investiture passée, il va bien falloir cependant se pencher sur les conditions particulières dans lesquelles l’élection du nouveau président a eu lieu et les difficultés qui pourraient entourer son magistère si jamais il ne fait pas preuve d’un minimum de précaution et de lucidité managériale. Depuis son investiture comme candidat de la coalition « Diomaye Président », de nombreux commentaires ont été faits sur son âge. Des commentaires plutôt favorables, puisque d’aucuns considèrent sa jeunesse – et sans doute à juste raison – comme un indiscutable atout pour une nation longtemps écrasée par une hégémonie gérontocratique en ses plus hautes instances.
Cependant, l’on ne doit guère perdre de vue que la jeunesse peut aussi être un handicap si elle n’affiche pas une résistance digne de ce nom face aux forces résiduelles du « système », qui, de toute évidence, chercheront par tous les moyens à se diluer dans une réalité gouvernementale révolutionnaire dont elles ont été démocratiquement éjectées.

Cette appréhension est d’autant plus valable que le nouveau président n’était pas le sujet dûment préparé pour l’emploi. C’est au bout du bout, lorsque la machine révolutionnaire du Pastef a compris que son candidat de cœur Ousmane Sonko n’était plus dans les dispositions légales d’être investi candidat, que le sabre de rechange (Diomaye Faye) a été sorti du fourreau. Qu’il soit loyal, compétent, méthodique, rigoureux, brillant comme élève et étudiant, exemplaire et irréprochable comme fonctionnaire ; qu’il soit la clé du cerveau du fameux projet Pastef ; bref, qu’il soit dépositaire de toutes les enviables qualités humaines et professionnelles qu’un jeune de son âge puisse posséder, cela ne doit point nous faire perdre de vue qu’il n’était pas le choix numéro un de la coalition qui l’a porté au pouvoir ; et qu’il devra donc puiser au plus profond de lui-même des ressources psychologiques supplémentaires pour inhiber les substances toxiques que ne manqueront pas de laisser dans l’opinion le caractère plus ou moins accidentel de son accession à la Magistrature suprême. Car, de toute façon, quoi qu’on puisse dire, ils sont nombreux les Sénégalais qui manifestent une sympathie viscérale envers son mentor Ousmane Sonko. Et qu’on ne pense surtout pas que cette tendance va décroitre. Dans les semaines qui viennent, dans les mois qui viennent, il va falloir que nous soyons préparés à écouter souffler ce vent de nostalgie envers PROS (sobriquet donné à Ousmane Sonko).

Evidemment, au regard de la manière dont le nouveau président a commencé à traiter Ousmane Sonko (il a soigneusement évité de citer son nom dans son discours d’investiture), on peut valablement penser qu’il y a une politique de concertation pointue entre les deux hommes et que d’un commun accord, ils ont décidé à faire de sorte que l’opinion ne puisse jamais dire que PROS fait de l’ombre à BDDF.
Il n’empêche que dans le cas d’espèce il y aura toujours des facteurs exogènes incarnés par des ennemis de la stabilité qui rôderont autour de cette entente intelligente pour en saper les fondements. C’est d’ailleurs pourquoi il ne serait pas exagéré de conjecturer déjà sur la responsabilité que le nouveau président voudra bien confier à son mentor. Il ne serait point étonnant qu’il soit désigné Premier ministre. Mais même à ce poste prestigieux, l’entente et complicité déclarées pourront elles survivre à l’expression tout à fait naturelle des egos ? Les professions de foi qui précèdent l’exercice du pouvoir ont souvent été invalidées par les réalités de l’exercice. Pour dire donc que, sans vouloir aucunement être dans la peau d’un oiseau de mauvais augure, si le duo Diomaye/Sonko parvient à garder toute son harmonie jusqu’au terme du mandat, c’est parce que le ciel aura totalement été du côté de notre cher pays.

Une autre équation non moins délicate c’est la gestion des souteneurs. Point n’est besoin de dire qu’il ne sera pas aisé de réussir le parfait dosage. On retrouve dans ce lot très hétérogène un peu de tout. Même des sujets qui ont presque goûté à tous les râteliers. Ainsi donc, si le nouvel élu ne garde pas toute sa lucidité, il risque de céder à une pression mal placé, et fera alors tout ce qu’il n’est pas souhaitable de faire en l’état actuel de l’évolution de notre Démocratie : faire du neuf avec du vieux. Il faut qu’il refuse de laisser prendre en otage et qu’il nomme librement les bonnes personnes aux bons postes, en parfaite intelligence avec PROS, qui a une claire conscience de la qualité intrinsèque des compétences nécessaires à la bonne exécution du « Projet ».

La réalisation des promesses tenues- Une tâche quasi sacrée !

La réussite ou l’échec du nouveau président se mesurera forcément à l’aune du respect ou non des promesses qu’il a faites et des engagements qu’il a pris. Aussi, faudra-t-il que dès la mise en place de son gouvernement, il pose des actes forts allant dans le sens de la prise en charge de certaines préoccupations majeures, qui ont entre autres pour noms : demande sociale (diminution du coût de la vie), emploi des jeunes et reddition des comptes. Dans la plupart de ses interventions pré électorales, on a entendu le nouveau président insister sur la nécessité de stopper l’inflation et de réduire le coût de la vie. Cette urgence est inscrite donc au cœur du fameux « projet », et les déplacements qu’il a faits dans le pays profond pendant la campagne avec sa coalition ont été un excellent baromètre pour mesurer la gravité des épreuves que le « panier de la ménagère » fait vivre à nos compatriotes.

Le Sénégalais résiste comme il peut, mais il a faim, et ses économies, qui sont déjà plus que dérisoires, sont régulièrement emportées par la tempête de la dépense quotidienne. Sans compter le coût vertigineux de la location, dont l’écrasante majorité de nos concitoyens sont tributaires. Dans un pays où la plupart des hommes et femmes en âge de travailler s’activent dans un secteur informel rendu névralgique par plusieurs facteurs et où le SMIG est d’une insignifiance hilarante, l’habitat ne devrait point représenter une sorte de monstre écervelé qui vient en rajouter à la fureur conjoncturelle. Bien malheureusement, tel est le cas ; et il faudra que dès ses premiers actes de gouvernance, le nouveau président affiche une détermination sans équivoque à faire peser la balance dans le sens d’un soulagement au bénéfice des masses affectées.

Dans la foulée de ses promesses de campagne, le nouveau président a beaucoup agité aussi la problématique de l’emploi des jeunes ; une réalité douloureuse que le régime sortant a bien eu du mal à prendre correctement en charge. Pastef est un projet majoritairement soutenu par des jeunes, dont la plupart sont réduits au chômage. Certains sont sans formation, mais beaucoup sont diplômés et avec le régime sortant, n’ont même jamais eu la possibilité de décrocher un stage. Ces jeunes, outrageusement frappés par le désespoir – c’est un secret de polichinelle – ont massivement voté pour la coalition « Diomaye Président ». Pas pour les beaux yeux d’un certain Ousmane Sonko (pour qui par ailleurs ils ont une admiration sans limites). Mais parce qu’ils ont la conviction qu’avec l’accession au pouvoir de ceux qui incarnent le projet du Pastef, la direction qui mène à la citadelle de l’Emploi massif leur sera ouverte dans les meilleurs délais. Pour cette catégorie sociale, il ne peut donc y avoir d’état de grâce en faveur du nouvel élu. Evidemment, comme l’a rappelé Pierre Goudiaby Atepa dans un organe de presse après l’investiture, il y a un minimum de temps de patience. Mais c’est par l’ampleur des signaux envoyés dès la mise en place du gouvernement que les Sénégalais jugeront de son degré de détermination dans ce sens.
Mais le plus gros chantier dans le cadre des priorités du nouveau président est et doit rester la reddition des comptes. Car, point n’est besoin de le rappeler : le régime sortant, en ce qui concerne la gestion de nos finances et de nos ressources, a, pendant douze ans, fait montre d’une boulimie révoltante. Il a instauré, avec la complicité passive de son capitaine Macky Sall, une politique de dilapidation hors normes, permettant à des arrivistes surgis de nulle part de profiter indûment de leurs postures directoriales ou ministérielles pour procéder à des détournements de d’objectifs gargantuesques.

Pendant plusieurs années, Ousmane Sonko a fait de cette question de pillage à grande échelle la mère de ses batailles, au péril de sa liberté individuelle. En effet, nous savons que s’il n’a pu être candidat, c’est essentiellement à cause de sa condamnation à six mois avec sursis, pour avoir publiquement parlé d’un rapport qui aurait épinglé le ministre Mame Mbaye Niang dans l’affaire PRODAC. Il y a fort à parier donc que le « Roi » et le « faiseur de Roi » ont dû faire serment pour faire de sorte qu’autant de milliers de milliards ne passent pas par pertes et profits.
On a, ces derniers temps, entendu pas mal de porteurs de bons offices monter au créneau pour prévenir contre une éventuelle chasse aux sorcières par le nouveau régime. Une telle initiative est de mauvais aloi. Une campagne de recouvrement de ces énormes mannes financières prises indûment au Contribuable sénégalais ne peut être qu’une initiative salutaire. Elles pourraient (ces mannes dérobées) servir à poser les premiers jalons dans le sens d’une politique de redressement d’autant de dégâts causés par le régime du « Macky », et dans les secteurs les plus divers. En usant des voies les plus légales, le président Diomaye Faye doit rapidement contraindre les respectables voleurs du régime précédent à secouer les tirelires ourdis. Il n’y a rien de malsain dans cette initiative et l’écrasante majorité des Sénégalais sont déjà en train de se frotter les mains pour la saluer.

Et puis quoi ? Concernant la plupart de ces horribles détournements, des rapports existent déjà, dûment établis par les organes de contrôle habilités, mais soigneusement placés sous le coude régalien du président sortant. Ils ne demandent qu’à être dépoussiérés et remis à qui de droit. Pour votre gouverne, nous pouvons rappeler, sous l’appellation générique de « scandales financiers », les nombreux crimes financiers qui ont jalonné la gouvernance SALL : scandale des fonds covid, Aliou Sall, scandale convention teranga gold, scandale myna, scandale Itoc, scandale foncier Mbane, scandale arène nationale, scandale Université Sine Saloum, scandale de l’hôpital Dantec, affaire arène nationale , pour ne citer que ça d’autant que la liste est loin d’être exhaustive

L’Afrique de l’Ouest divisé se retrouve le temps d’une investiture

Depuis que certains pays de l’Afrique occidentale (notamment le Mali, le Burkina Faso et la Guinée Konakry) se sont braqués contre la CEDEAO pour avoir été visés été par des mesures jugées impopulaires, à cause de la prise du pouvoir dans ces différents pays par des putschistes, c’est sans doute pour la première fois que ces dirigeants catalogués « têtes brûlées » et les plénipotentiaires de la célèbre institution ouest africaine se rencontrent officiellement dans une même enceinte. En effet, à côté des présidents Guinéens, Nigérian, entre autres hommes d’Etat. L’image était naturellement aussi belle que surprenante, vu la difficile évolution des relations entre ces différentes entités. Ils se sont souri. Ils se sont parlé. Et ils ont brièvement échangé.

On est donc en droit de penser que par la grâce de la Transcendance, le nouveau président du Sénégal incarne une nouvelle possibilité de réconcilier l’Afrique avec elle-même.


Mamadou Ndiaye

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