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King Fahd Palace: Un gros navire vide à bas-fonds

Le King Fahd Palace, l’un des fleurons de l’hôtellerie sénégalaise est à fond de cale. Absence de clients, assèchement de ses marchés fournisseurs, salles de réunions fermées, chambres vides et inoccupées, licenciements, l’hôtel, qui pleure ses clients disparus, est au bord du précipice. 

Même s’ils ont rouvert, les hôtels sont en grandes difficultés. Les chiffres concernant l’activité hôtelière sénégalaise n’ont jamais été aussi alarmants. Faute de touristes internationaux et de clients, en raison de la pandémie (couvre-feu, réduction des déplacements de loisirs et professionnels…), les hôtels sénégalais ont vécu et continuent de vivre une véritable descente aux enfers.

Au Sénégal, les restrictions imposées à cause du coronavirus ont fortement impacté l’industrie du tourisme. Le pays ne pouvant plus accueillir normalement de visiteurs étrangers ou touristes, échaudés par les dures restrictions de voyage. De nombreux hôtels sont au bord du gouffre.

Le Président de la Fédération des organisations patronales de l’industrie hôtelière au Sénégal, Mamadou Racine Sy, évoquant la crise profonde du tourisme au Sénégal, révélait que le secteur a déjà perdu plus de 300 milliards FCFA en termes de chiffres d’affaires.

Deux fleurons de l’hôtellerie sénégalaise, à savoir le Terrou-bi et le King Fahd Palace, ont perdu chacun 9 milliards FCFA. Même si 4 milliards de Fcfa ont été payés aux réceptifs hôteliers.

Avec la fin de l’état de catastrophe sanitaire décrété le 19 mars dernier, l’espoir demeurait pour les réceptifs hôteliers. Mais que dalle ! L’exemple de l’hôtel King Fahd en est la parfaite illustration. Les effets de la fermeture des frontières aériennes de l’Union européenne se font toujours sentir. Le joyau, le King Fahd, est comme un gros navire vide.

« Nous n’avons pratiquement plus de clients. Tous les voyages sont quasi annulés, nous a confié le directeur de l’hôtel, Mr. Pierre Mbow.

« Les gens ne peuvent plus voyager à cause de plusieurs États de l’Union européenne (UE) qui ont durci les restrictions pour essayer de freiner la propagation du virus. »

Les États membres  exigent des voyageurs venant d’une zone « rouge foncé » qu’ils effectuent un test avant leur arrivée et qu’ils respectent une quarantaine.

« J’étais en ligne avec une personne quand vous m’appeliez et elle me dit qu’elle a été bloquée à l’aéroport de Roissy. Il a payé un billet à plus de 1200 euros mais il a perdu le billet, faute de ne pas pouvoir embarquer. Les gens ne voyagent plus car les restrictions sont toujours là et n’ont pas été levées », rembobine-t-il.

« Nous recevions beaucoup de clients venant de l’Europe, mais ce n’est plus le cas. Les Sénégalais qui vivent en France ne peuvent plus venir en vacances. Il faut que les gens puissent voyager pour relancer le secteur bien que la crise est mondiale. Tant que les gens ne pourront pas voyager, nous n’aurons pas de clients dans nos hôtels », dit-il, la mort dans l’âme.

« Quand vous voyagez, on vous fait faire des tests, et arrivé dans votre pays d’accueil, on vous met en quarantaine dans votre hôtel, bref toutes ces tracasseries n’encouragent pas à les voyageurs », déplore-t-il. Non sans préciser qu’il faut tout faire pour vaincre le coronavirus au Sénégal et ailleurs afin de sauver le tourisme. « Nous sommes tributaires du voyage et des voyageurs », souligne Pierre Mbow. « Même si vous êtes munis de vos tests,  arrivé à Roissy vous devez juste donner les raisons de vos voyages. »

King Fahd affiche un taux de 5% d’occupation

 L’état des réservations affiche un taux d’occupation catastrophique de 5% à l’hôtel King Fahd. «Actuellement, on loge qui ?  On ouvre  un hôtel pour 5% d’occupation contre 70%. Ça ne vaut pas le coup», relève Pierre Mbow, soutenant que l’hôtel ne peut plus faire face aux charges. « On a actuellement 20 clients alors qu’on recevait 500 à 700 clients en temps normal. L’hôtel King Fahd Palace, c’est 378 chambres et c’est occupé parfois en double. » Et le King Fahd Palace, ce n’est pas seulement ses chambres et ses suites, c’est aussi ses bureaux et salles de réunion qui ne sont plus occupés ce moment-ci.  «Plus les hôtels sont haut de gamme, plus ils s’adressaient à une clientèle internationale, plus ils souffrent », résume-t-il. Sans congrès, salons et événements et sans clientèle étrangère, l’hôtel King Fahd est alors en mauvaise situation. Pour preuve, l’hôtel qui faisait un chiffre d’affaires qui dépasse le milliard par mois se retrouve aujourd’hui au maximum avec seulement une centaine. 

76 employés perdus sur un total de 370 emplois

Malgré les programmes de relance économique mis en place par l’Etat, depuis l’apparition du Covid-19, cet appui ne semble pas avoir mis fin à la dégradation de la situation économique, du moins dans le secteur du tourisme. En effet le King Fahd Palace hôtel a mis au chômage 76 membres de son personnel, sur un total de 370 », nous souffle Pierre Mbow. « Nous avons payé tous les droits au personnel licencié et cela nous a coûté des centaines de millions Fcfa », a-t-il dit, non sans rappeler qu’il y a également un personnel envoyé au chômage technique.

Interpellé sur les travaux de rénovation en cours, le directeur indique que c’est un investissement qui est prévu depuis très longtemps. « On est appuyé par des banques qui ont avancé leur argent, et en contrôlent l’utilisation. Cela n’a absolument rien à voir avec des ressources générées actuellement par l’hôtel», précise Pierre Mbow.

Et la situation n’est guère plus reluisante pour les autres hôtels où nous nous sommes rendus. C’est l’omerta totale.

Les réceptifs comme Terrou-Bi, Radisson Blu ne cachent pas qu’ils vivent aussi des fins de mois difficiles.

Mais les employés que nous avons accrochés n’ont  pas voulu s’épancher sur le sujet. On nous file un numéro de téléphone fixe pour prendre rendez-vous. Mais dès que l’on compose le numéro, au bout du fil, une voix féminine nous répond : « Bienvenue au Radisson Blu, pour continuer en français, tapez 1, tapez 2 pour continuer en anglais, si vous voulez réservez, tapez… »

Idem à l’hôtel Terroubi. « Prenez rendez-vous, on ne peut pas communiquer sur le sujet, laissez-nous un numéro où l’on peut vous joindre », nous balance une dame préposée au secrétariat. 

La situation du King Fahd risque, se reproduit un peu partout dans le pays. A Saly, nous confie Mbow, des touristes sont bloqués en France car  tout voyage en dehors de l’Union européenne est soumis à des restrictions strictes.

Il n’y a plus clients, comme à King Fahd, toutes les portes sont presque fermées

 Pour preuve, 1137 emplois sont en péril dans la célèbre station balnéaire de Saly Portudal, d’après les chiffres dévoilés par l’Agence nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD).


Cette situation n’est pas seulement aux réceptifs hôteliers sénégalais. Le pays connaît les mêmes déboires que ses pairs africains. Du Maroc à l’Afrique du Sud, du Cap-Vert à l’Ethiopie, le tourisme a connu un coup d’arrêt brutal et prolongé sur l’ensemble du continent. Selon le Conseil mondial du voyage et du tourisme (WTTC), la crise du secteur pourrait entraîner la destruction de 7 millions à 17 millions d’emplois sur l’année 2020, dans une région du monde déjà frappée par un chômage très élevé. Au premier semestre, les arrivées de voyageurs internationaux en Afrique ont chuté de 57 %, selon l’Organisation mondiale du tourisme (OMT).

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