Des experts indépendants des Nations Unies ont exhorté, jeudi, les autorités nigérianes à « libérer immédiatement et sans condition » le chanteur Yahaya Sharif-Aminu, qui a été reconnu coupable de blasphème pour avoir écrit une chanson et l’avoir diffusée sur le service de messagerie sociale, WhatsApp.
« Bien que sa condamnation à mort ait été annulée par une cour d’appel, nous restons profondément préoccupés par le fait que l’affaire de M. Sharif-Aminu fera l’objet de nouvelles poursuites sur la base du même cadre juridique, le code pénal de la charia de l’État de Kano, avec de sérieux risques que la condamnation à mort soit confirmée », ont alerté dans un communiqué, les experts indépendants onusiens.
Yahaya Aminu Sharif a été condamné à mort le 10 août 2020 en raison d’une chanson jugée blasphématoire.
Privation arbitraire de la vie
« Si la condamnation à mort est reconfirmée par un tribunal, le gouvernement doit suspendre l’exécution jusqu’à ce que les lois du Nigéria soient conformes à ses obligations internationales en matière de droits humains pour ce qui est de la peine de mort », ont-ils affirmé, rappelant que « l’imposition de la peine de mort pour blasphème équivaudrait à une privation arbitraire de la vie au regard du droit international ».
Les experts notent que la Cour suprême du Nigéria a été saisie de l’affaire, mais restent profondément préoccupés par le fait que M. Sharif-Aminu est en prison depuis trop longtemps pour avoir « exercé ses droits de l’homme ». « Nous demandons instamment à la Cour suprême de considérer le cas de M. Sharif-Aminu comme une priorité et d’adopter d’urgence une décision qui tienne compte des obligations du Nigéria en vertu du droit international des droits de l’homme ».
Abolir de la peine de mort
Ils ont demandé au gouvernement de réexaminer rapidement la situation de M. Sharif-Aminu, rappelant que toute personne a le droit à la liberté d’expression et de manifester sa religion ou ses convictions par l’expression artistique, sans craindre l’emprisonnement, les représailles ou même l’exécution.
Par ailleurs, les experts ont également exhorté le gouvernement nigérian à abolir l’imposition de la peine de mort pour le crime de blasphème et à veiller à ce qu’elle soit limitée aux « crimes les plus graves », à l’issue d’un procès équitable. Les experts ont recommandé au Nigéria d’instaurer un moratoire sur la peine de mort, en vue de l’abolir complètement.
Outre Alexandra Xanthaki, Rapporteure spéciale sur les droits culturels, le communiqué est aussi endossé par Nazila Ghanea, Rapporteure spéciale sur la liberté de religion ; Irene Khan, Rapporteure spéciale sur la promotion du droit à la liberté d’opinion ; Margaret Satterthwaite, Rapporteure spéciale sur l’indépendance des juges et des avocats ; et Morris Tidball-Binz, Rapporteur spécial sur les exécutions arbitraires.