Depuis l’aube de nos indépendances nominales, de forts slogans nationalistes ont régulièrement traversé les discours de nos hommes d’Etat et bercé d’illusions notre peuple.
Abreuvés par ces slogans diffusés dans un ton envoûtant, mobilisateur et moralisateur, ils avaient réussi à galvaniser pendant une certaine période notre peuple. Ces slogans étaient destinés à secouer la fibre patriotique d’un peuple qui avait servi de repères lumineux à beaucoup d’autres peuples africains durant la longue nuit coloniale.
De partout, on chantait les vertus de l’autosuffisance alimentaire, de consommer local, du penser par soi-même et pour soi-même, de l’identité nègre, de l’authenticité africaine et que sais-je encore.
60 ans après rien, rien de ce qui avait été promis, établi comme horizon culturel, économique, politique n’a été atteint. Aucune cohérence idéologique ni culturel. La faim règne partout, dans les campagnes marginalisées dont certaines ressemblent à des vestiges préhistoriques.
Notre consommation est surtout aujourd’hui tributaire de l’étranger, de l’ancienne puissance coloniale qui contrôle encore les maillons les plus sensibles de notre économie. Notre éducation, notre système éducatif pour ainsi dire est extraverti : il faut penser « toubab », c’est-à-dire européen. Socrate, Hegel, la Grèce, Rome, Platon, Hugo, Verlaine, pour faire sérieux, pour être dans le ton et dans le temps. Notre phénotype a changé, victime de l’occidentalisation de notre univers culturel.
Nos femmes ne veulent plus être noir charbon, c’est une honte. Il y a une « khessalisation » à outrance de notre peau, même chez les hommes, au moment où l’on croit fermement dans certains milieux que pour être un élu de Dieu, il faut être un arabe, singé à la folie l’arabe.
Dès lors, il ne faut pas s’étonner que notre culture foute le camp parce que nous sommes devenus des monstres culturels. Des êtres hybrides culturellement, n’ayant aucune consistance culturelle.
Un constat alors : si c’est cela le réalisme politique, il est temps de devenir idéaliste, parce qu’encore une fois, nous sommes à la croisée des chemins.