L’on commençait déjà à sentir à travers les réseaux sociaux que l’omerta du nouveau Président de la république par rapport aux foyers religieux commençait à peser et que les gens s’impatientaient de savoir sa posture vis-à-vis d’eux. Sa sortie d’hier prouve que le fils de Ndiaganiao était dans une logique de ne pas s’emmêler les pinceaux. Et quand il dit à Serigne Mountakha : « je n’ai pas voulu entamer mes voyages sur l’international sans au préalable venir vous rendre visite », il a aussi sous-entendu que ce périple ne pouvait pas se faire avant son installation dans ses nouvelles fonctions de Chef d’État encore moins avant la mise en place de son premier gouvernement. Et si on y voit de plus prés, on se rend compte que le timing est assez révélateur d’une belle maîtrise d’un calendrier assez bien ficelé.
Entre la visite à Touba et Tivaouane et la prise de pouvoir effective depuis le 02 avril dernier , l’eau n’a coulé sous les ponts que pendant 12 petits jours. Bref , dans la démarche , il est clair que Diomaye Faye a été bien préparé. Dans la démarche et dans le discours surtout à Touba où il a fait les bons gestes et évoqué les vrais problèmes que sont les inondations, l’eau potable et l’éducation.
LES DÉTAILS DE LA VISITE
1- Les pieds nus
De Senghor à Macky en passant par Diouf et Wade, jamais un Chef d’État n’a eu l’idée de se débarrasser de ses chaussures dès son arrivée dans la concession du khalife Général des Mourides. Les quatre premiers qui ont devancé au palais le fils de Ndiaganiao ont toujours gardé jalousement leurs babouches au pied. Le mieux qu’ils ont tous fait , c’est s’en écarter le temps d’entrer dans la chambre du chef religieux et tout de suite les récupérer juste après le huis-clos. Diomaye , lui, a choisi de laisser les siennes dans la voiture . Ce qui témoigne à suffisance qu’il n’a jamais été dans ses plans de fouler le sol de la maison de Serigne Mountakha avec des chaussures. Le geste est tellement important que Cheikh Bassirou Mbacké Abdou Khadre s’en est émerveillé à travers un sourire bruissant de parole et teinté d’admiration.
En milieu mouride , marcher pieds nus dans la maison est un signe , un détail qui marque le respect. Mame Cheikh Ibra Fall n’avait jamais accepté, du temps de Cheikh Ahmadou Bamba, que les gens marchent avec des sandales dans la cour de ce dernier. Accusé de manquer de considération aux chefs religieux, Bassirou Diomaye venait , rien qu’à travers ce geste , de démentir son monde .
2- Un langage corporel adéquat
En plus de marcher pieds nus dans la maison du Khalife, Bassirou Diomaye Faye a adopté durant tout son passage un langage corporel très bien soigné et surtout très adéquat .D’abord , ce « bismilah » marmonné du bout de ses lèvres à sa descente de véhicule, ses pieds hâtés pour recevoir la poignée de main de Cheikh Bassirou Mbacké Abdou Khadre , sa tête inclinée durant tout le trajet du portail au salon du patriarche, son silence….
3-Son Ziar dans la mosquée
Venir à Touba sans passer dans la grande mosquée, c’est comme n’être jamais passé à Touba. Diomaye , son Excellence, a compris l’adage. Bien qu’attendu à Tivaouane, il ne s’est pas empêché d’aller effectuer son Ziar. Sur ce chapitre, il rejoint Wade et Macky qui n’ont jamais loupé ces occasions. Accompagné de Cheikh Bassirou Mbacké Abdou Khadre qu’il a accueilli dans sa voiture , le Chef de l’État a d’abord effectué deux rakka avant de s’engouffrer dans le mausolée de Cheikhoul Khadim. Ses prières formulées, il prendra congé de ses hôtes avant de filer vers la capitale de Tidjaniya.
4-Sobriété dans le dispositif sécuritaire
À l’annonce en exclusivité de l’arrivée imminente du Chef de l’État à Touba par « Dakaractu – Touba » , beaucoup s’étaient étonné de remarquer l’absence d’un jalonnement policier flagrant. Les hommes en kaki étaient là mais en nombre limité et de manière discrète. C’est à peine qu’on pouvait sentir leur présence. Sous Macky et Wade, c’est des hommes en mitrailleuses qui longeaient la route et qui bloquaient la circulation un tour d’horloge avant l’arrivée du Président de la république. Ce dispositif était renforcé à l’abord de la résidence du Khalife.
Pire, le protocole prenait possession de la maison , confinant « bëk-nek » dans leurs chambres. Et c’est assez fréquemment que des embrouilles étaient notées. Hier, la reconnaissance du terrain n’a duré qu’une demi-heure et elle n’a été faite que par une poignée d’hommes. Aucun débordement, aucune bousculade , juste de la tranquillité !
5-Les points abordés dans son discours
Un Chef d’Etat Sénégalais qui vient à Touba en ce moment et qui , dans son discours , n’évoque pas les problèmes liés aux inondations, à l’eau potable et à l’éducation peut être considéré comme étant carrément passé à côté. Diomaye , pour son premier face-à-face avec Serigne Mountakha n’a pas raté le coche à ce niveau . En effet, après avoir assuré de son accompagnement, il a clairement signifié sa ferme volonté d’aider la cité à se départir de ses difficultés.
Touba vit depuis plus de 20 ans des hivernages compliqués avec un spectre terrible d’inondations. Des maisons ont été englouties , des familles chassées par les eaux et des vies perdues. Cette situation est endolorie par une nappe phréatique trop proche de la surface et qui menace les cimetières derrière la grande mosquée, Darou Khoudoss, Sourah , Guédé, Darou Miname , Ocass etc…
Touba souffre aussi d’un manque d’eau impressionnant. L’eau disponible n’est ni suffisante, ni potable ni agréable.
Source: DakarActu