Onze pays, surtout en Afrique, en Asie et au Moyen-Orient, présentent un risque élevé de tensions sociales en raison de la flambée des prix alimentaires. D’après une étude publiée par Allianz Trade, onze pays font face à des risques de soulèvements sociaux dans les années à venir, liés à une crise alimentaire. La guerre en Ukraine, l’inflation et les perturbations sur les chaînes d’approvisionnement sont les principales causes relevées par le groupe d’assurance-crédit.
« Le choc sur les prix alimentaires mondiaux représente une inquiétude particulièrement grande pour les pays qui sont importateurs net d’aliments ou de certains aliments devenus rares en raison de la guerre en Ukraine, à l’instar des grains », écrit l’assureur dans une étude publiée mardi 14 juin. « Si nous ne nourrissons pas les peuples, nous nourrissons le conflit », prévient l’assureur Allianz Trade dans une étude estimant que onze pays, surtout en Afrique, en Asie et au Moyen-Orient, présentent un risque élevé de tensions sociales en raison de la flambée des prix alimentaires.
Ce choc alimentaire réduit l’accès aux ressources « et pourrait même entraîner la chute de certains gouvernements comme lors des printemps arabes », analyse l’assureur. Une référence aux mouvements de contestation populaire au tournant des années 2010, nourris par l’aggravation de la misère et à l’origine de la chute de plusieurs régimes comme en Tunisie ou en Égypte.
À l’époque, les prix alimentaires avaient augmenté de 50 %, rappelle Allianz Trade. Or, le prix du blé est désormais supérieur aujourd’hui à son niveau de 2012. De plus, la crise ukrainienne affecte les disponibilités alimentaires puisque le pays exportait jusqu’ici 15 % du blé mondial. Avec les restrictions sur les exportations d’engrais et de gaz russes, la hausse des prix de l’énergie rendrait aussi plus coûteuse la production d’engrais et le fonctionnement d’équipements agricoles. Sans oublier les effets persistants de la crise sanitaire, qui a elle aussi contribué à perturber les chaînes d’approvisionnement dans le monde.
L’assureur estime que onze États sont particulièrement à risque de voir émerger des conflits sociaux dans les prochaines années, notamment en raison de leur dépendance aux importations. La liste comprend l’Algérie, la Tunisie, la Bosnie-Herzégovine, l’Égypte, la Jordanie, le Liban, le Nigeria, le Pakistan, les Philippines, la Turquie et le Sri Lanka. Ce dernier pays traverse déjà la pire crise économique depuis son indépendance. À l’heure actuelle, seules la Bosnie-Herzégovine et l’Égypte ont commencé à adopter des mesures visant à préserver le pouvoir d’achat, malmené par la hausse de l’inflation et les conséquences de la pandémie.
Des inquiétudes du côté de l’Afrique subsaharienne
D’autres pays importateurs net de nourriture présentent, selon l’assureur, un risque de conflits sociaux, mais moins élevé. Il s’agit notamment de la Roumanie, de Bahreïn ou du Kazakhstan. L’Arabie saoudite et la Chine sont aussi dans cette catégorie, mais les risques de conflits y sont encore un peu plus bas, leur situation financière se révélant plus solide.
Le Fonds monétaire international avait déjà alerté fin avril sur « les risques de troubles sociaux » en Afrique subsaharienne en raison de la flambée des prix des aliments. Le directeur du département Afrique, Abebe Aemro Sélassié, confiait alors être « inquiet » face à la situation.
Des mouvements de protestation plus ou moins violents avaient éclaté en 2008 dans une trentaine de pays, notamment au Sénégal et au Cameroun, ainsi qu’au Maghreb et dans les Caraïbes en raison d’une forte augmentation des prix des aliments de base. L’Afrique subsaharienne importe 85 % de sa consommation de blé, avec des besoins particulièrement élevés en Tanzanie, en Côte d’Ivoire, au Sénégal et au Mozambique, note le Fonds fin avril.