Les récents affrontements meurtriers entre les deux plus grands groupes armés dans la capitale libyenne, Tripoli, soulignent la situation sécuritaire désastreuse qui y règne et compromettent les préparatifs des élections prévues plus tard cette année, a déclaré mardi l’Envoyé spécial de l’ONU pour le pays.
Au moins 55 personnes auraient été tuées et plus de 100 blessées, dont des civils, dans les combats entre le Dispositif de dissuasion pour lutter contre le crime organisé et le terrorisme (DACOT) et la 444e Brigade, les 14 et 15 août, a indiqué le chef de la mission politique de l’ONU en Libye, la MANUL, devant le Conseil de sécurité. « Ces développements soulignent l’absence de commandement et de contrôle sur l’appareil de sécurité fragmenté dans l’ouest de la Libye et l’état précaire de la situation sécuritaire », a déclaré Abdoulaye Bathily, ajoutant que cela souligne la nécessité urgente d’établir un gouvernement et une armée unifiés.
Le Représentant spécial du Secrétaire général de l’ONU pour la Libye a également mis en garde contre les « retombées potentielles » des effets de la prise de pouvoir par des militaires au Niger sur la Libye ainsi que sur l’ensemble de la région. « Il est essentiel que toutes les parties préservent les acquis sécuritaires réalisés ces dernières années. À cette fin, la MANUL continuera à impliquer les acteurs concernés pour faire progresser la réunification des institutions militaires et de sécurité, une condition [essentielle] pour une stabilité durable », a dit M. Bathily.
Arrestations et violations des droits humains
L’envoyé de l’ONU a également attiré l’attention des ambassadeurs sur la situation des droits de l’homme et la situation humanitaire en Libye, notant les enlèvements, les arrestations arbitraires et les disparitions dans l’est et l’ouest du pays. Au 5 mai, 19.103 personnes, dont 216 femmes, étaient détenues dans 28 prisons officielles relevant du ministère de la Justice. Beaucoup sont en détention prolongée avec un accès limité ou retardé à la procédure judiciaire, selon la MANUL.
En outre, des hommes et des femmes détenus dans toutes les régions de Libye seraient soumis à des mauvais traitements, à des violences sexuelles, à la torture ou à l’exploitation sexuelle en échange d’eau, de nourriture ou d’autres articles essentiels. « Je réitère mon appel à l’arrêt immédiat de ces pratiques, à la libération des personnes arbitrairement détenues et à des enquêtes indépendantes », a déclaré M. Bathily, appelant également à la fin des expulsions de migrants, de réfugiés et de demandeurs d’asile à la frontière entre la Tunisie et la Libye. « J’exhorte les autorités tunisiennes et libyennes à garantir que les personnes soient envoyées dans des endroits sûrs et à permettre à l’ONU et à ses partenaires un accès humanitaire à tous les sites », a-t-il ajouté.
Des mesures provisoires pleines de risques
En conclusion, M. Bathily a souligné qu’il est d’autant plus important d’assurer la stabilité en Libye à la lumière de la situation au Niger et au Soudan et a appelé à un accord politique inclusif ouvrant la voie à des élections pacifiques, inclusives et transparentes. « Les événements actuels en Libye et dans la région démontrent que les arrangements intérimaires comportent de nombreux risques de violence et de désintégration pour les pays », a-t-il déclaré.
Il a rappelé aux dirigeants leur responsabilité politique et morale de sortir de l’impasse actuelle et de contribuer à ouvrir la voie à une nouvelle ère d’élections démocratiques, de paix et de prospérité.