Ce sont globalement dix ministres de la République qui ont été cités dans le rapport définitif de la Cour des comptes sur la gestion des fonds-covid-19 (Covidgate). Les noms d’Abdoulaye Diouf Sarr, Abdoulaye Daouda Diallo, Moustapha Diop, Abdoulaye Diop, Aïssatou Sophie Gladima, Néné Fatoumata Tall, Zahra Iyane Thiam, Mansour Faye, Ndèye Saly Diop Dieng, Aminata Assomme Diatta, ont fait le tour du rapport rendu public par la Cour des comptes qui a saisi, le garde des sceaux pour l’ouverture d’informations judiciaires.
Le président de la République, pour sa part, a invité le Premier ministre à faire le travail nécessaire pour faire la lumière et sanctionner les fautifs sur l’utilisation de ces fonds spéciaux dans un contexte spécial. Mais comment se fera l’ouverture de cette information judiciaire ? Comment procéder à la mise en place des membres de cette haute cour chargés d’entendre des membres du gouvernement ? Qu’est ce qu’il faut pour faire passer la résolution afin de voir l’instruction être enclenchée ?
La Haute cour de justice est une juridiction d’exception. Sa mise en place peut se faire dès la désignation des députés composant l’assemblée nationale aussitôt après les élections. Si cette cour n’est pas mise en place, l’assemblée peut se réunir pour désigner les membres de cette cour. Ici, pour rappel, on n’est pas dans une juridiction permanente. Si la juridiction n’a pas été déjà désignée, on peut bien élire les députés la composant. La Haute cour de justice est donc composée de membres élus et ils sont au nombre de huit avec des magistrats. Le premier président de la Cour suprême fait également partie des membres.
Dans un entretien téléphonique accordé à Dakaractu, le juriste pénaliste, le Pr Ndiack Fall invite à retenir : que normalement, la désignation de la haute cour de justice provient d’une résolution dont l’initiative vient des députés et qui est soumise au vote pour l’attraction de tel ou tel ministre devant la Haute cour de justice. Ce vote doit se faire à la majorité des 3/5 de la composition de l’assemblée nationale. Une fois que la commission est mise en place, l’instruction débute alors avec le président de la Cour d’appel. Ce nombre autour de 99 parlementaires sera-t-il obtenu même si plusieurs députés de l’opposition notamment se sont levés pour des manœuvres impliquant les députés de Wallu ?
On peut clairement dire, selon le Professeur interrogé sur les modalités de la mise en place de cette cour, dès réception de la résolution des députés, le procureur général notifie la mise en accusation au président de la Haute cour et au président de la commission d’instruction (convoquée sans délai sous ordre de son président). Il invite chaque inculpé à constituer sa défense par toute personne de son choix. Le juge d’instruction joue ainsi le rôle de filtre. Soit, il prend en considération que les choses méritent d’atterrir au niveau de la Haute cour de justice et le moment venu, une ordonnance de renvoi au niveau de cette cour pourrait être faite. Mais, avance le juriste, s’il estime qu’il n’y a pas suffisamment de charges, l’ordonnance de « non-lieu » est faite et l’affaire s’arrête à ce niveau. Si toutefois, la Haute cour de justice est saisie, et qu’elle procède soit à une condamnation ou une relaxe, sa décision n’est susceptible ni d’appel, ni de pourvoi en cassation. Il n’y a qu’un jugement définitif et ainsi, ce qui reste ouvert, c’est bien le pourvoi en révision. Cette révision est une mesure exceptionnelle où on revient sur une condamnation déjà définitive. Cela intervient en général lorsqu’on dispose d’éléments qui montrent qu’en réalité, la décision peut être conçue comme une erreur judiciaire. La juridiction compétente pour ce faire, est la Cour suprême.
En outre, le président peut exprimer son souhait de poursuivre tel ou tel ministre, mais c’est au parlement de donner son avis à travers une résolution qui fait l’objet de vote au niveau de l’assemblée nationale. Il faut rappeler, selon l’article 101 de la constitution en son alinéa 2, « le ministre et les autres membres du gouvernement sont pénalement responsables des actes accomplis dans l’exercice de leurs fonctions et qualifiés de crimes ou délits au moment où ils ont été commis. Ils sont jugés par la Haute Cour de Justice. Dans l’alinéa 3 du même article, il est clairement expliqué que « la procédure définie ci-dessus leur est applicable, ainsi qu’à leurs complices, dans le cas de complot contre la sûreté de l’Etat. Dans les cas prévus au présent alinéa, la Haute Cour est liée par la définition des crimes et délits ainsi que par la détermination des peines, telles qu’elles résultent des lois pénales en vigueur au moment où les faits ont été commis ».