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Présidentielle 2024 : la « dream team » de Idrissa Seck

L’ancien Premier ministre, Idrissa Seck qui s’est retiré en avril de la coalition au pouvoir, trace son chemin vers la magistrature suprême en s’appuyant sur une équipe d’amis, de fidèles et d’anciens camarades de route du Parti démocratique sénégalais (PDS). Jeune Afrique dévoile sa « dream team » pour la Présidentielle de 2024.

Bien que leur lien soit rompu, Idrissa Seck a bien des choses en commun avec son ancien mentor, Abdoulaye Wade. Ce dernier, avant d’accéder au pouvoir en 2000 après près de trente ans d’opposition, a, par deux fois, en 1991 et en 1995, accepté d’occuper les fonctions de ministre d’État dans un gouvernement d’union nationale d’Abdou Diouf.

Alterner entre alliance avec la majorité et l’opposition, c’est également le choix qu’a fait Idrissa Seck. En se retirant une première fois, en 2013, de la coalition au pouvoir Benno Bokk Yakaar (BBY) après avoir soutenu Macky Sall au second tour l’année précédente. Puis en rejoignant à nouveau le camp de l’actuel président en novembre 2020.

Bien qu’il la justifie par le devoir patriotique de soutenir un pays alors en pleine crise économique du fait de la pandémie de Covid-19, cette initiative incomprise lui a valu le départ de cadres de son parti, dont Déthié Fall, son vice-président. Pis, la perte de la région de Thiès, fief sur lequel il a régné pendant plus de vingt ans, lors des élections locales de janvier 2022 puis des législatives de juillet.

Même après avoir échoué à trois élections présidentielles – il en a fallu cinq à Abdoulaye Wade pour accéder au pouvoir –, Idrissa Seck croit plus que jamais en son destin. Ses ambitions se sont façonnées dans l’épreuve, à partir de 2004, lorsque celui qui était alors Premier ministre est tombé en disgrâce aux yeux du leader charismatique du Parti démocratique sénégalais (PDS). Accusé de détournement de fonds dans l’affaire des chantiers de Thiès, dans un contexte de divergences politiques, et incarcéré entre juillet 2005 et février 2006, il en est sorti ragaillardi et, surtout, blanchi.

À sa sortie de prison, il a fondé le parti Rewmi en s’appuyant sur des personnalités politiques, sympathisants et camarades du PDS, regroupés au sein du Mouvement de soutien à Idrissa Seck (MSIS), qui a vu le jour lorsqu’il était emprisonné. Près de vingt ans plus tard, c’est encore sur une poignée d’entre eux que l’ancien président du Conseil économique, social et environnemental s’appuie pour briguer la magistrature suprême en février 2024 et, surtout, fait barrage à un éventuel troisième mandat de Macky Sall, alors que le pays s’enfonce dans une profonde crise politique après la condamnation à deux ans de prison ferme d’Ousmane Sonko, le principal opposant du chef de l’État sénégalais.

Yankhoba Diattara

Bras droit d’Idrissa Seck, Yankhoba Diattara, 52 ans, doit son ascension politique à l’ancien Premier ministre. Le 3 avril, à la veille de la fête de l’Indépendance et alors qu’Idrissa Seck s’était exprimé contre un troisième mandat de Macky Sall, l’ancien ministre des Sports a a�rmé, lui, sur un plateau de télévision que le chef de l’État sénégalais avait droit d’y prétendre. Le lendemain, il sera démis de ses fonctions de deuxième vice-président de Rewmi et remplacé par Abdoulaye Ndoye, médecin-dentiste, jusqu’ici secrétaire national du parti chargé de la Santé.

Le désaveu sera cependant de courte durée. Après des excuses médiatisées, Idrissa Seck a très rapidement réhabilité son lieutenant en le promouvant, au plus près de lui, au poste de directeur de cabinet politique. Cette nomination a consacré leur fidélité. Considéré comme l’homme de confiance de l’ancien Premier ministre, Yankhoba Diattara a grandi politiquement sous les ailes de l’ancien maire de Thiès, dont il a été le premier adjoint. Au sein du parti créé en 2006, il a gravi les échelons avant de faire son entrée au gouvernement en novembre 2020 comme ministre de l’Économie numérique, à la faveur de l’entrisme d’Idrissa Seck dans la majorité présidentielle.

Mais plusieurs sources au sein de la formation politique le rendent en partie responsable de la défaite de Rewmi à Thiès lors des élections locales de janvier 2022. De fait, en avril 2022, lui a été retiré la coordination du parti dans la cité du rail, juste avant les législatives qui ont suivi.

Aly Saleh Diop

Ingénieur agronome, Aly Saleh Diop, 66 ans, est l’autre membre de Rewmi à avoir occupé un portefeuille ministériel au sein du gouvernement de Macky Sall, de novembre 2020 jusqu’au départ d’Idrissa Seck de BBY en avril. Apolitique jusqu’à la fin des années 1990, l’ancien ministre de l’Élevage a rejoint le parti politique libéral à la création de celui-ci, en 2006. D’abord par amitié, puis par soutien à l’ancien Premier ministre d’Abdoulaye Wade, alors en proie à des déboires judiciaires, au plus fort de la crise politique qui l’opposait à l’ex- chef d’État.

C’est en 1987 que les deux hommes se rencontrent pour la première fois. Cette année-là, Idrissa Seck, qui travaille comme auditeur pour le cabinet britannique PwC, est chargé de passer au peigne fin les comptes du Fonds commun de contrepartie de l’aide alimentaire, dont le comité de gestion est administré par Aly Saleh Diop. Ils se fréquentent plus assidûment à partir de 1990, les locaux du cabinet Iris, un bureau d’études spécialisé dans les enquêtes agricoles, étant désormais proches de ceux de la structure de conseil d’Idrissa Seck. Au sein de Rewmi, l’ingénieur occupe le poste de quatrième vice-président et il est le référent du parti dans le département de Linguère, sa ville d’origine.

Ass Babacar Gueye

Pour passer l’étape essentielle des parrainages afin de valider son dossier de candidature, Idrissa Seck saura compter sur son secrétaire national chargé des élections, qui avait déjà coordonné la collecte des signatures citoyennes lors de la présidentielle de 2019. Ass Babacar Gueye a commencé à côtoyer l’ancien Premier ministre au début des années 2000 au sein du PDS, avant de prendre fait et cause pour lui lors de ses démêlés avec la justice.

Après avoir rejoint Rewmi, Ass Babacar Gueye est devenu, en 2012, le directeur de cabinet du ministre de l’Hydraulique, Oumar Gueye. Lequel représentait, avec Pape Diouf, alors ministre de la Pêche, le parti Rewmi au sein du gouvernement lors de la première alliance d’Idrissa Seck avec Macky Sall. Mais, en 2013, contrairement aux deux ministres qui ont décidé d’intégrer la majorité présidentielle, le professeur de lycée à la retraite a démissionné par loyauté envers Idrissa Seck, qui s’est retiré de la coalition au pouvoir. Par reconnaissance, c’est à lui que l’ancien maire de Thiès a confié la direction de son cabinet après qu’il a pris en novembre 2020 la présidence du Cese.

Abdou Fouta Diakhoumpa

Pur produit du système éducatif sénégalais – il est diplômé de l’École normale supérieure et de l’Ena de Dakar –, Abdou Fouta Diakhoumpa a fait une grande partie de sa carrière au sein de l’administration, avant de rejoindre la filiale locale de Société générale comme cadre supérieur. Alors qu’il avait mis un terme au militantisme politique en 1996, cet ancien membre du Rassemblement national démocratique (RND) de Cheikh Anta Diop a décidé de soutenir Idrissa Seck à partir de 2004, avant de devenir un membre fondateur de son parti.

Au début du mandat de Macky Sall, en 2012, Abdou Fouta Diakhoumpa a lui aussi assuré les fonctions de directeur de cabinet de Pape Diouf. Mais, tout comme son camarade Ass Babacar Gueye, l’ancien directeur des ressources humaines de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad) a été contraint de démissionner en 2013. Premier adjoint au maire de Thiadaye, une commune située dans le département de Mbour, à 80 km au sud de Dakar, Abdou Fouta Diakhoumpa est, depuis 2021, à la tête de la cellule des cadres du parti. Celle-ci était restée sans responsable après le départ en 2019 de l’ancien porte-parole, Abdourahmane Diouf, également candidat à la présidentielle de février 2024.

Matar Seye

Conseiller en gestion de portefeuille, Matar Seye est l’un des référents du parti Rewmi sur les questions financières. Et à ce titre, il contribue à définir le programme économique de l’ancien Premier ministre. Tout comme Aly Saleh Diop et Abdou Fouta Diakhoumpa, le secrétaire général du parti a rejoint en 2005 le Mouvement de soutien à Idrissa Seck. Basé à Dakar, Matar Seye coordonne la section locale de la formation politique dans la commune de Biscuiterie.

Chouaib « Jacob » Coulibaly

Expert en assurance, Chouaib « Jacob » Coulibaly devient, en 2014, le coordinateur de Rewmi aux États-Unis, où il vit depuis 2000. Sans passé de militant, il s’investit dans le parti de l’ancien Premier ministre à partir de 2006. L’incarcération de ce dernier est le déclic qui le conduit à s’engager politiquement. À partir de 2007, en marge de la première présidentielle à laquelle participe l’ancien maire de Thiès, et trois ans après sa rupture avec Abdoulaye Wade, Chouaib « Jacob » Coulibaly écrit dans les médias sénégalais des articles favorables à son nouveau leader et très critiques à l’égard du régime de l’ex-président sénégalais.

Mais c’est en 2015 que cet ancien étudiant en philosophie à Paris rencontre pour la première fois l’ancien Premier ministre. D’abord sporadiques, les échanges entre les deux hommes deviennent de plus en plus fréquents au fil des ans. Dans la perspective de la présidentielle de février 2024, Chouaib « Jacob » Coulibaly, qui a été le candidat malheureux de la coalition Manko Taxawu Sénégal lors des législatives de 2017 au sein de la diaspora, travaille à renforcer les bases politiques du parti, outre-Atlantique.

D’ailleurs, lors d’un voyage d’Idrissa Seck à New York, en mars, il a aidé l’ancien Premier ministre à rencontrer plusieurs militants. Ce dernier a d’ailleurs profité de ce séjour pour signer un contrat de lobbying avec son ami de longue date, l’avocat américain à la retraite James  Johnson. Lequel l’a récemment mis en contact avec Jeffrey Smith, qui dirige l’organisation Vanguard Africa. Objectif : mobiliser l’opinion publique et les o�ciels américains contre une troisième candidature de Macky Sall.

Mamadou Lamine Ba

Contrairement à certains de ses camarades au sein du parti, Mamadou Lamine Ba ne rejoint Idrissa Seck qu’à la veille de la présidentielle de 2012. Quelques mois plus tôt, il a été limogé par Abdoulaye Wade – dont il fut successivement, entre 2000 et 2011, le ministre de l’Environnement et de la Coopération internationale, puis des Affaires humanitaires – après s’être opposé publiquement à sa volonté de briguer un troisième mandat.

Mais les relations entre l’ex-maire de Thiès et l’ancien vice-président de l’Internationale libérale n’ont pas toujours été uuides. En 2004, lorsque Idrissa Seck est tombé en disgrâce, Mamadou Lamine Ba a pris parti pour Abdoulaye Wade, qu’il considère aujourd’hui encore comme son mentor. Mais les deux hommes ont fini par se réconcilier et l’ancien Premier ministre a proposé à son nouvel allié de fondre sa formation politique, le Parti pour la liberté et la citoyenneté (PLC), dans la sienne. C’est donc ensemble qu’ils sont allés à la présidentielle de 2019, lors de laquelle Idrissa Seck a terminé deuxième derrière Macky Sall, avec 20,51 % des voix.

Au sein de Rewmi, celui qui est réputé pour son franc-parler œuvre à renforcer les liens entre le parti et différents organismes a�liés à l’Internationale libérale, dont la fondation Friedrich Naumann, organe de réuexion du Parti libéral démocrate qui finance régulièrement les formations d’étudiants étrangers en Allemagne. Mamadou Lamine Ba a d’ailleurs lui-même bénéficié des bourses de l’institution allemande lors de ses années d’études à Berlin, entre 1988 et 1998. Il est appuyé dans cette mission par François Calixte Sagna. Secrétaire général adjoint du parti, ce juriste de formation de 41 ans est conseiller communal et départemental dans la ville de Koungheul.

Ousmane Diaïté

Membre fondateur de Rewmi après plusieurs années de militantisme au sein du PDS, Ousmane Diaïté, 54 ans, est chargé des structures du parti. Basé en Casamance, il s’active à approfondir les bases politiques dans le sud-ouest du pays. Celui qui détient aussi des entreprises dans le BTP est également le premier vice-président du conseil départemental de Sédhiou, où il vit.

Yankhoba Seydi

Fidèle d’Idrissa Seck, Yankhoba Seydi s’est fait discret lorsque l’ancien Premier ministre, qui lui porte toujours une grande estime, a décidé de rejoindre la majorité présidentielle en 2020. Mais l’universitaire, en désaccord avec le choix du leader du Rewmi, n’a pas pour autant quitté la formation politique et s’est juste contenté d’y suspendre ses activités.

Avant novembre 2020, il assurait la coordination du mouvement des enseignants du supérieur de Rewmi et de l’école du parti. Réconcilié avec l’ancien Premier ministre depuis son départ de BBY, il a tout de même été remplacé à la tête des cellules dont il avait la charge par Mamadou Sidibé, ancien doyen de la faculté des sciences et techniques de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Responsable de la section locale du parti à Grand Yoff, l’une des communes de la capitale sénégalaise, ce dernier coordonne depuis novembre 2022 le projet de création d’un centre universitaire dans la région de Matam, dans le nord du Sénégal.

Marietou Dieng

Dans la droite ligne de la décision d’Idrissa Seck, Marietou Dieng, qui est la seule députée du parti à l’Assemblée nationale, a démissionné en avril du groupe parlementaire de la majorité présidentielle présidé par Me Oumar Youm. Désormais non-inscrite au sein de l’hémicycle, elle est l’une des figures féminines émergentes de Rewmi. Ancienne militante du PDS, cette ingénieure en microbiologie a également fait partie des soutiens de la première heure d’Idrissa Seck en 2004.

Au sein de la formation libérale, celle dont la mère est une cousine éloignée de Ndèye Penda Tall, l’épouse de l’ancien Premier ministre, a successivement gravi les échelons pour en devenir la cinquième vice-présidente. La coordinatrice de Rewmi dans le département de Keur Massar, dans la banlieue de Dakar, est également une membre active du Réseau international des femmes libérales (INLW) allié à l’Internationale libérale.

Penda Ndao

Le parcours de Marietou Dieng inspire déjà une jeune génération de militantes, parmi lesquelles Penda Ndao, qui compte marcher dans les pas de son aînée. À seulement 30 ans, elle a été nommée en avril secrétaire générale adjointe du parti, point d’orgue d’un parcours politique entamé en 2010 après une rencontre avec la femme du leader.

Avant d’être promue, cette auditrice financière à l’Agence de construction des bâtiments et édifices publiques (Acbep) était secrétaire nationale à la jeunesse féminine, un poste désormais occupé par Fatou Ndao, conseillère municipale d’une des communes du département de Guédiawaye. Cette dernière est secondée par Mory Gueye, le secrétaire national à la jeunesse.

Tout comme la parlementaire, Penda et Fatou Ndao sont également très actives dans les réseaux libéraux à l’international. En 2022, la première a notamment participé en Allemagne au programme sur le leadership de la fondation Friedrich Naumann. L’année précédente, elle avait été désignée meilleure étudiante d’un programme sur l’autonomisation des femmes financé par le Réseau libéral africain.

Ndèye Maguette Dièye

Avant Marietou Dieng, Idrissa Seck a d’abord pu compter sur Ndèye Maguette Dièye lors de ses déboires judiciaires. Figure du PDS, plusieurs fois députée jusqu’en 2017, maire entre 2002 et 2009 de la commune Fann-Point E-Amitié, où réside Abdoulaye Wade dont elle est la nièce Ndèye Maguette Dièye est considérée comme la pionnière du mouvement des femmes de Rewmi. « Je suis très attaché à elle, comme elle l’est à moi » commente d’ailleurs Idrissa Seck.

Mais la première vice-présidente du parti se tient depuis plusieurs mois en retrait des activités politiques en raison de sa santé fragile. Consultée toutefois régulièrement pour toutes les grandes décisions, elle est appuyée par Awa Guèye Kébé, ministre de la Femme pendant l’ère Wade, restée également fidèle à l’ancien maire de Thiès. Cette dernière travaille à la restructuration du mouvement des femmes.

Surnommé Mané le fidèle, Pape Abdou Mané suit Idrissa Seck depuis vingt-trois ans. En 2004, il a créé l’un des premiers mouvements étudiants favorables à l’ancien Premier ministre. Chargé des relations presse du parti Rewmi, il a joué ce rôle d’interface entre le leader libéral et les journalistes depuis 2007.

À ce titre, il a accompagné dans toutes ses fonctions officielles Idrissa Seck, dont il a l’oreille. Pape Abdou Mané voue une telle loyauté à ce dernier qu’il a donné le prénom d’Idrissa à l’un de ses jumeaux. Le second porte le nom de Yankhoba, en hommage à l’ancien ministre des Sports, dont il est également proche.


En tant qu’attaché de presse, Pape Abdou Mané travaille de concert avec Daouda Ba, porte-parole du parti, et Babacar Mar, secrétaire national à la communication digitale. Cette équipe est suppléée par l’ancien journaliste Ousseynou Masserigne Gueye. Ce dernier, qui n’est pas membre du parti, faisait office de conseiller technique à la communication au sein du cabinet d’Idrissa Seck au Conseil économique, social et environnemental.

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