Alors qu’Haïti est confronté à une escalade de la violence et un effondrement systémique, ses enfants subissent de plein fouet une crise à multiples facettes qui menace leur vie, leur sécurité et leur avenir.
C’est le message brutal qui a été entendu lors d’une session spéciale organisée lundi par le Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC), au cours de laquelle des Ambassadeurs, des fonctionnaires de l’ONU, des responsables humanitaires et des Haïtiens ont souligné les conditions désastreuses qui règnent en Haïti, appelant à une action immédiate pour soutenir les plus jeunes de ses citoyens.
Avec 5,4 millions de personnes confrontées à une insécurité alimentaire aiguë la moitié de la population, dont la moitié sont des enfants- et 700.000 personnes déplacées, une intervention internationale urgente est nécessaire pour faire face à une crise aggravée par la violence des groupes armés, l’instabilité économique et l’insuffisance des fonds humanitaires.
« Pourquoi est-il plus facile pour un jeune d’obtenir un fusil qu’un repas en Haïti ? »
En donnant le coup d’envoi de la réunion, l’Ambassadeur canadien et actuel Président de l’ECOSOC, Bob Rae, a cité les propos tenus par un jeune haïtien âgé de 17 ans qui habite Cité Soleil, l’un des quartiers les plus durement touchés par la violence des gangs dans la capitale du pays, à qui on avait demandé de partager un message à la réunion.
« Attention aux enfants… ce sont des innocents »
« La protection des enfants ne doit pas être une option. Elle doit être une priorité absolue. Et des mesures immédiates et concrètes doivent être prises », a affirmé l’artiste haïtien Jean Jean Roosevelt, lors de son allocution, avant d’interpréter sa chanson « Attention aux enfants ».
Ambassadeur de bonne volonté de l’UNICEF, Jean Jean Roosevelt a dressé le sombre tableau de la réalité à laquelle sont confrontés les 1,5 million d’enfants touchés par les troubles civils et la violence des groupes armés. « À Port-au-Prince, un enfant sur deux est victime de violences physiques et plus de 3.100 enfants victimes de violences sexuelles ont été enregistrés l’année dernière… une augmentation de 400% par rapport à l’année 2022 », a-t-il signalé, soulignant que « les écoles, autrefois sanctuaires de savoirs et de croissance, deviennent désormais des bastions pour des groupes armés ».
Les enfants représentent désormais jusqu’à 50% des effectifs de gangs et ils sont « sous la menace d’abandonner de rêver de devenir ou être enseignant, enseignante, infirmier, infirmière, ingénieur ou médecin ». Malgré les difficultés, les agences des Nations Unies et leurs partenaires continuent de fournir de l’aide.
Face à l’augmentation des déplacements et de l’insécurité alimentaire, le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations Unies a annoncé une réponse élargie, ciblant près de deux millions de personnes avec une aide d’urgence. La nouvelle Directrice du PAM en Haïti, Wanja Kaaria, a fait valoir l’engagement de l’agence : « Nous avons fourni des quantités record d’aide alimentaire aux Haïtiens à Port-au-Prince et dans tout le pays ces derniers mois et nous ferons encore plus dans les semaines à venir ».
Le PAM soutient également les économies locales en se procurant 70 % des ingrédients des repas scolaires auprès des agriculteurs haïtiens, ce qui favorise la résilience et le développement à long terme. Pourtant, l’ampleur de la réponse est dérisoire par rapport aux besoins croissants.