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Interview avec INDEX ÑUUL KUKK «J’ai une relation spirituelle avec l’écriture»

« Ñuul Kukk », qui signifie littéralement « plus noir que noir», se nomme à l’état civil Al Hassan Salam. De Saint-Louis de ses origines à l’université de Picardie où il suit un Master II de Sociologie, ce jeune chanteur pétri de talent revendique un style musical hybride. Chez lui, « Ñuul » n’est pas qu’une couleur, c’est un état d’esprit. Dans cet entretien exclusif, « Ñuul Kukk » qui se définit comme un écrivain qui chante et non comme un chanteur qui sait écrire, ne voit pas seulement noir.

Présentez-vous à nos lecteurs

Je m’appelle Al-Hassane Salam Seck, plus connu sous le nom d’artiste Index Ñuul Kukk. Index, c’est mon nom de scène et Ñuul Kukk, le nom de mon groupe.

Index Ñuul Kukk ? D’où vient ce surnom?

Ñuul Kukk est le nom du groupe de rap dans lequel je suis et Index, on va dire que c’est le doigt qui a le plus de fonctions, le doigt utilisé pour pointer quelqu’un, montrer une direction à quelqu’un, témoigner de la grandeur et l’unicité de Dieu, pour menacer quelqu’un, entre autres. La main de manière générale symbolise la création, elle est sacrée. Pour moi, le doigt qui a le plus de fonctions, c’est l’index. Index, c’est le doigt qui témoigne de la grandeur et de l’unicité de Dieu. Si on est artiste et qu’on arrive à percevoir le monde de manière différente des autres, on arrive aussi à voir que tout ce qui est aujourd’hui a été créé par une force qui est supérieure à tout le monde et cette dernière, c’est Dieu. Et pour le coup, « Index » c’est une façon de dire Dieu est grand !

Parlez-nous de vos débuts ?

A la base, je voulais juste écrire des textes et j’ai découvert que je pouvais le faire sur de la musique. J’ai commencé le rap un peu tardivement, lorsque j’étais au lycée. Mais pour ce qui est de la musique, de manière générale, j’ai commencé très tôt. C’est en 2008 que j’ai fait le choix de me lancer dans la musique, j’ai dû faire des concessions, laisser les études de côté et me consacrer exclusivement à la musique. Le début n’était pas trop difficile, j’ai intégré un groupe qui est devenu « Ñuul Kukk ». Je me suis fait coacher et ça m’a facilité les choses, en plus du soutien de ma famille. Je dirais que j’ai eu un début plutôt riche, j’ai été dans un cadre hip-hop, le groupe que j’ai intégré m’a donné les bases, m’a fait une place et rien que pour ça, je n’ai pas à me plaindre. Sinon la galère, c’est comment réussir à se faire un nom, ça n’a pas été facile, mais l’amour de la musique était plus fort.

Dites-nous en un peu plus sur votre style de musique

C’est très difficile d’en parler, d’ailleurs je refuse de le définir, car je n’y arrive toujours pas. Ce que je fais aujourd’hui c’est la somme de tout ce que j’ai fait dans le passé. Dans le rap, ce sont les textes qui m’ont fasciné, cette capacité de faire de la poésie sur de la musique. Mon style, c’est mon univers, c’est-à-dire tout le mélange de musique que j’ai découvert depuis tout petit jusqu’à l’âge adulte (chants religieux, reggae, rap..). J’ai du mal à mettre un nom sur mon style de musique, par contre je mets l’accent sur l’identité musicale. Autant on ne peut pas me canaliser dans un style précis, autant dès que je chante, on peut savoir que c’est un Sénégalais, un Africain qui chante, une sorte de tradi-moderne. Et c’est cette identité-là qui m’importe le plus et si je devais définir ma musique je la définirai comme quelque chose d’africain tout simplement.

D’où tirez-vous votre inspiration ?

Je remets tout entre les mains de Dieu. C’est Lui qui a créé le monde et c’est Lui aussi qui inspire le monde. A chacun son inspiration, qu’on soit négatif ou positif. Il y en a qui sont doués pour faire du bien et inversement. Pour moi, il n’y a aucune scène de la vie qui se présente à nous par hasard, il y a toujours un message derrière. A chaque fois que je regarde le monde ou ce qui m’entoure, je me demande toujours la leçon qu’il y a à tirer. En pensant de la sorte, je dirai que tout m’inspire.

On sent la poésie dans vos écrits. Vous êtes écrivain ?

Je me définis comme un écrivain qui chante et non comme un chanteur qui sait écrire ! Cet amour pour la poésie, c’est le rap qui me l’a transmis. Pour la petite histoire, j’étais à Kaolack, je jouais au babyfoot, nous étions des gamins, d’un seul coup, les autres se sont mis à faire des rimes en wolof, c’était beau, ça m’a marqué et c’est de là qu’est né mon amour pour la poésie. Je m’y suis  intéressé, j’ai fait des recherches. Les écritures artistiques m’ont fasciné avant même que je ne fasse de la musique. A la base, je voulais être écrivain avant même de faire de la musique. Quand j’ai découvert  le rap, ça m’a permis de savoir que je pouvais être Wolof dans ma propre langue, mais aussi de pouvoir écrire des « livres » sur du son.

Quelle est votre relation avec l’écriture ?

Sans exagération, elle est quasi-fusionnelle ! L’écriture c’est la base de toute la vie, j’ai une relation très spirituelle avec l’écriture. J’aborde des thèmes de société, mais c’est toujours de façon très spirituelle. J’essaie toujours de dépasser le sens commun, ce que tout le monde dit, semble voir, je fais en sorte d’aller au-delà, quand je chante l’amour, j’essaie d’aller au-delà du je t’aime, car après tout, tout le monde le dit.  Si Dieu écrit les êtres humains différemment, alors pourquoi moi, je devrais écrire de manière similaire aux autres ? Originalité Yallah moko ndieuk créer (rire) !

Qu’est-ce qui a amené Index en France ?

J’y suis allé pour la toute première fois avec mon groupe Ñuul Kukk en 2012. Nous avons fait beaucoup de voyages pour des festivals, des concerts, entre autres. Après la sortie de notre album en 2015 à Saint-Louis, j’ai fait le choix de reprendre les études, la filière pour laquelle j’avais opté n’existait pas ici. Le rap m’a ouvert les portes de l’Université en Europe, j’en ai profité pour faire des concours. Quand j’ai réussi à un de ces concours, je m’y suis installé, j’ai étudié, bossé. Ça a duré 5 ans et me voilà maintenant.

Comment trouvez-vous l’environnement musical sénégalais ?

L’environnement musical sénégalais est très riche, mais pas assez exploité. Il y a beaucoup d’innovations à faire, le terrain est propice à tous, à l’originalité, à faire de la musique, de l’a capella. Mais malheureusement, il n’y a que deux courants musicaux qui dominent. On gagnerait à ce que ces deux courants dominants s’inspirent beaucoup de ce qui n’est pas visible pour le rendre visible. Pour faire un mélange, pour rappeler les grands noms de la musique sénégalaise, pour faire connaître les types de musique que les Sénégalais ignorent. Il faut qu’on arrive à s’inspirer de tout ça, à faire une réactualisation, une modernisation pour continuer à garder notre identité musicale et ne pas se faire « bouffer » par la culture musicale occidentale.

Des featurings en vue ?

Oui énormément ! Il y a d’abord le projet de Julio L’Absolu où je dois figurer, 2 featurings avec Leuz Diwane, un autre artiste vivant en Europe. Il y a également un autre projet spécifique intitulé Sunu Demb ak Taye, un projet historique qui compte reprendre l’histoire du Sénégal, particulièrement du Cayor en musique.  Pleins d’autres surprises vous attendent.

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ANNA THIAW

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