Alors que les dirigeants de la Cédéao se réunissent dimanche pour débattre de la réponse à apporter au deuxième coup d’État perpétré au Mali en moins d’un an, Emmanuel Macron a assuré, dans un entretien au Journal du dimanche, qu’il envisageait un retrait de Barkhane si le Mali allait « dans le sens » des jihadistes.
Emmanuel Macron fait monter la pression sur le nouveau pouvoir à Bamako. Dans un entretien au Journal du dimanche (JDD) publié le 30 mai, le président de la République affirme que la France retirera ses troupes si le Mali allait « dans le sens » d’un islamisme radical, après un deuxième coup d’État dans le pays en neuf mois.
La France, avec environ 5 100 hommes au sein de Barkhane, soutient le Mali qui fait face depuis 2012 à une poussée jihadiste partie du Nord et ayant plongé le pays dans une crise sécuritaire avant de s’étendre au centre du pays. Mais Paris, comme l’UE, a dénoncé mardi un « coup d’État inacceptable » après l’arrestation du président Bah Ndaw et du Premier ministre Moctar Ouane, décidée par l’homme fort du pays, le colonel Assimi Goïta.
« Au président malien Bah Ndaw, qui était très rigoureux sur l’étanchéité entre le pouvoir et les jihadistes, j’avais dit : ‘L’islamisme radical au Mali avec nos soldats sur place ? Jamais de la vie !’ Il y a aujourd’hui cette tentation au Mali. Mais si cela va dans ce sens, je me retirerais », a mis en garde le président français, dans un entretien accordé à l’occasion d’un voyage au Rwanda et en Afrique du Sud.
Le chef de l’État affirme également avoir « passé le message » aux dirigeants d’Afrique de l’Ouest qu’il « ne resterait pas aux côtés d’un pays où il n’y a plus de légitimité démocratique ni de transition ». Il rappelle avoir dit depuis trois ans « au sein de plusieurs Conseils de défense que nous devions penser à la sortie ».
Concernant le Tchad, où un Conseil militaire de transition (CMT) est présidé par l’un des fils d’Idriss Déby, Mahamat, après la mort brutale en avril de l’ancien chef de l’État, Emmanuel Macron estime que « les choses sont claires ». « Nous venons au secours et en soutien d’un État souverain pour qu’il ne soit pas déstabilisé ou envahi par des groupements rebelles et armés. Mais nous demandons la transition et l’inclusivité politique », assure-t-il.
Le président français explique que lorsqu’il s’est rendu aux obsèques d’Idriss Déby, il a eu « un long échange » avec Mahamat Déby à la veille du G5 Sahel. « Le lendemain matin, avec les autres chefs d’État, nous sommes allés le voir pour lui demander cette ouverture politique avec le soutien de l’Union africaine. »
Emmanuel Macron met aussi en garde contre un échec de la politique de développement en Afrique. « Je le dis avec lucidité, si on est complices de l’échec de l’Afrique, on aura des comptes à rendre mais on le paiera cher aussi, notamment sur le plan migratoire », estime-t-il.
Le président de la République réaffirme qu’il faut donc « investir massivement » au sortir de la pandémie de Covid-19 « avec l’équivalent d’un plan Marshall » et que la communauté internationale doit avoir « la générosité de dire qu’on efface une partie de la dette pour aider les Africains à bâtir leur avenir ».