Roger Sallah, c’est l’acteur dans la série Nafi et dans bien d’autres du landerneau cinématographique. De là, le préjugé serait aisé de l’étiqueter dans le bling bling inconsistant des strass et paillettes. Mais à parcourir ses réponses aux interpellations de Rewmi Quotidien, on est bluffé par l’éclectique consistance de sa répartie réfléchie et adossée à une connaissance light du monde. Silence on tourne…
QUI EST ROGER SALLAH ?
Je suis un jeune sénégalais d’origine togolaise et ghanéenne, qui est né et a grandi à Dakar où j’ai fait mes études. Je suis simple, j’aime rigoler, je suis assez fou, j’aime la musique, la danse, j’aime ma famille et surtout je prends la vie du bon côté. Je suis acteur de cinéma et de téléfilms mais aussi mannequin, top model, voix off, voix de publicité, doublage. Je suis également dans le social, à travers le Lion club. Je travaille beaucoup avec les enfants, j’ai eu mon diplôme de moniteur et de collectivité éducative ou de colonie de vacances.
VOUS AVEZ ETE REVELÉ DANS LA SERIE NAFI. COMMENT S’EST DEROULÉ LE CASTING?
A vrai dire, c’est à la sortie d’un doublage de voix que je faisais pour un personnage de la série Pod et Marichou qu’on m’a proposé le casting de la série Nafi. Ils m’ont retenu de go et en même temps, j’ai été pris dans Pod et Marichou pour faire de la figuration. Là, j’ai fini la saison 2 et je commence la série Nafi.
VOUS ETES MAINTENANT DANS LE CINEMA. EST-CE FACILE D’ENTRER DANS LE HAUT NIVEAU ?
Oui et non. Si tu ne travailles pas ton jeu d’acteur, si tu ne travailles pas pour être au top, non car c’est assez compliqué d’y entrer. Il faut une certaine rigueur, une certaine discipline. Ce qu’il faut savoir avec le haut niveau, c’est qu’on ne t’apprend pas à jouer, c’est un scénario qui est là et que tu dois apprendre. On te fait confiance pour un rôle, il faut avoir un bon jeu d’acteur et c’est ce qui te permet d’être bien. Par exemple, moi actuellement, je suis en train de tourner une série, il n’y a personne pour me coacher. Par contre, quand c’est de grosses productions, il peut arriver qu’on ait des coachs. A vrai dire, ils te font confiance parce qu’ils savent que tu as déjà un parcours, tu as fait un bon casting et que le rôle te va bien. Ce qu’il faut surtout, c’est de la concentration et de l’effort.
QUEL REGARD PORTEZ-VOUS SUR LE CINEMA SENEGALAIS?
Je porte un regard très prometteur sur le cinéma sénégalais, je trouve qu’il avance. Je dis toujours qu’il y a une différence entre le cinéma et la production audiovisuelle. Je m’explique : Les séries pullulent à Dakar, c’est bien mais ce n’est pas du cinéma. Pour moi, le cinéma c’est tout ce qui est long, court métrage, des films qui vont aux festivals. Les séries, c’est plus de la production audiovisuelle, ça nourrit un peu le milieu cinématographique dans lequel il évolue, c’est-à-dire le pays dans lequel il est fait. Le cinéma sénégalais, au temps, était très poussé, mais là, c’est en train de revenir petit à petit. Nous avons les grands noms d’avant, c’est-à-dire les Moussa Sene Absa, Moussa Touré. Pour le moment, nous n’avons pas encore cette prise de flambeau des jeunes se lançant dans tout ce qui est long ou court métrage, ils sont plus dans les séries.
VOTRE NIVEAU D’ETUDE ?
J’ai un Bac plus 4 en études africaines et postcoloniales au département d’anglais de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar. J’ai été orienté en master 2 où je devais écrire mon mémoire. Ça n’a pas pu se faire, le cinéma ayant pris beaucoup de place dans ma vie. Entre les voyages et les tournages, je n’ai pu finir mon année.
QU’EST-CE QUE LE CINEMA A CHANGÉ DANS VOTRE VIE?
Beaucoup de choses. J’ai un autre regard sur le cinéma. Maintenant que je suis acteur, je regarde les films différemment. En plus, j’ai actuellement une perception plus large, plus ouverte de la vie, une perception différente de l’humain. A vrai dire, il faut être intelligent pour faire du cinéma, il faut une culture générale, une ouverture au monde, il faut se documenter, lire, s’informer, tout le temps être au taquet. Le cinéma m’ouvre au monde, me fait découvrir beaucoup de choses, m’apprend à me connaître. Avec le cinéma, tu incarnes beaucoup de rôles, beaucoup de personnages et ça t’aide à savoir qui tu es vraiment, ce que tu peux faire. En plus, il y a les nouvelles rencontres, les nouveaux contacts, entre autres.
QUELLE LECTURE FAITES-VOUS DES SERIES SENEGALAISES ?
C’est une bonne chose (il insiste), parce que ça nourrit le climat cinématographique sénégalais. Ce qu’il ne faudrait pas faire, c’est se lancer dans du « n’importe quoi ». Vouloir faire des films ne signifie pas faire n’importe quoi. Nous avons une image à préserver de notre cinéma, de nos jeunes et pour le coup, il faudrait des histoires solides, des choses concrètes qui pourront vendre la destination touristique du Sénégal. C’est bien que les séries pullulent, qu’il y ait des productions, par contre, ce que je déplore, c’est la qualité de certaines séries. Il faudrait de la qualité si on veut arriver loin. Et ce travail, c’est aux maisons de productions de le faire, elles doivent prendre le temps de nourrir leurs projets. Lesquels doivent être concrets, précis. Les producteurs doivent surtout savoir où ils vont et avec qui ils vont, parce que le choix des acteurs est très important. Un projet peut ne pas être top, mais la qualité du jeu d’acteur peut mener le projet loin.
LES RELATIONS ENTRE CELEBRITÉS SURVIVENT-ELLES AU SUCCES, A L’ECHEC?
Disons que cela dépend de ce que la personne célèbre appelle célèbre (il se répète comme pour insister). Je n’ai pas de problèmes avec les célébrités, encore moins avec mes collègues acteurs, je fais mon travail et nous avons de bons rapports. Les clashs entre célébrités sont des choses qui ne manquent pas, parce c’est souvent des questions d’ego. Pour moi, c’est à poser par terre et avancer, nous sommes tous là pour faire avancer les choses, vendre la destination de notre pays. Me concernant, je n’ai pas demandé à être célèbre, je fais du cinéma parce que j’aime ce que je fais, c’est une passion. J’en fais pour inspirer des gens, pour amener un autre regard de notre cinéma africain, pour montrer ce qu’est un acteur africain. D’ailleurs, je me sens en mission. Beaucoup de jeunes me suivent et je dois être une lumière pour eux. Ce que les gens doivent savoir, c’est que le métier d’acteur, c’est un travail, un métier comme un autre.
DE LA DROGUE DANS LE MILIEU CINEMA. RUMEUR OU VERITÉ ?
Parlant du cinéma sénégalais, africain que je suis en train de faire, ce sont des choses que je n’ai pas encore vues. Mais s’agissant du cadre international, ce sont des choses qui existent, des vices comme tout le monde en a. Que ce soit la drogue, l’alcool, ce sont des choses qui existent dans le milieu. C’est un milieu assez délicat, difficile et pour certains acteurs, c’est une échappatoire, ils se disent qu’ils peuvent en prendre pour pouvoir être calmes, bien sur le plateau. Pour avoir fait une série sur la drogue, je connais les effets, je sais ce que ça fait et c’est une mauvaise chose, je suis contre. Il faut beaucoup faire attention, en tant qu’acteur, se préserver, avoir une vie saine.
QUELS SONT VOS PROJETS?
Je suis actuellement en Côte d’Ivoire, j’y tourne une série gabonaise, une création originale Canal+ avec la boîte de production Osso Tv. Nous tournons entre Abidjan et Libreville (Gabon). Sinon je sors de deux longs métrages, il y en a un autre qui m’attend au Nigeria. En gros, j’ai pas mal de projets qui arrivent et pour l’heure, ça va, je rends grâce à Dieu.
UN DERNIER MOT ?
Je félicite tous mes collègues cinéastes qui font un très beau travail pour l’avancée du cinéma africain, sénégalais. Faisons des projets concrets, qui peuvent nous porter loin, qui peuvent promouvoir la destination sénégalaise. Pour ceux qui veulent rentrer dans le monde du cinéma, je leur dirai de toujours savoir pourquoi ils le font. On ne fait pas les choses juste pour le simple plaisir. Le plaisir est éphémère, la passion et l’amour restent.
ANNA THIAW